« Eh... » Joseph agitait les bras frénétiquement en hurlant, « ne mets pas mon ami dans tes bêtises. Tu penses sérieusement qu'il peut s'intéresser à une fille comme toi ? »
Un moment de silence passa, puis papa pris de nouveau la parole. « Papa Mboumba... merci, nous n'allons pas vous faire perdre plus de temps. Je vais vous raccompagner. »
Maître Mboumba se leva, et nous aussi en signe de respect. Il laissa échapper un soupir, et dit, « Ne vous en faites pas. Je vais rentrer seul. Vous, réglez vos problèmes de famille. » Me lançant un dernier regard.
Ainsi, ma mère déclara, « tu es en train de me faire honte devant les gens. D'ici à ce soir, tout le village saura que tu es enceinte d'un bâtard. »
Papa attendit que le guérisseur soit un peu loin avec les voisins qui couraient derrière lui, pour murmurer, « Il n'y a pas de bâtard. On en parlera plus tard lorsqu'on sera à l'abri des regards, dans la maison. » Avant de se lever et de rentrer. Tous le firent. Et ma petite sœur osa même me dévisager en riant.
Seule Laurie resta à mes côtés. De là, je fondis en larmes dans ses bras. « Laurie, je te jure que c'est vrai. »
« Je sais... » J'entendis son cœur violemment battre pendant que ma tête était posée sur sa poitrine alors qu'elle ajouta, « une personne abusée ne peut que reconnaître les blessures d'un semblable. »
« Quoi ? » Je relevais la tête.
Elle chuchota, « Mon beau-père... » Un regard perdu, comme si des souvenirs refaisaient surface.
« Cet homme-là que ta mère ne connaît que depuis quelques mois ? » Je me positionnais face à elle, indignée.
« Ah... elle en est si amoureuse que... » Laurie s'arrêtait, sa voix n'osant plus sortir sinon les larmes retenues dans ses yeux auraient aussi sûrement coulé.
« Qu'avons-nous fait pour mériter cette vie ? Quelle est donc cette société dans laquelle la femme doit garder le silence à cause de sa faiblesse physique ? »
Laurie me prit la main et d'une voix tremblante chuchotait, « Peut-être est-ce même pour cela que nous n'avançons pas. Car les hommes ne veulent pas nous écouter. »
« Laurie, je te promets. Ma voix sera écoutée et des gens se prosterneront devant moi. » Avais-je juré, le regard épinglé sur le vide.
Voici donc comment la douleur me menait à la rébellion. Le diable souriait sûrement quelque part en entendant ces paroles.
Comme avec Job. Oui, il se faisait un malin plaisir à me voir souffrir. Mais qu'attendons-nous de lui ?
D'un être qui désira fortement faire un coup d'État à notre Seigneur, désirant prendre Sa place ?
Il n'y a que de la méchanceté en lui. Il jalouse, il envie et il s'émeut de colère.
Est-ce pour cela que le Christ nous conseille de ne pas convoiter les biens de notre prochain ? Parce que c'est de cette façon que le diable est tombé ?
Que sais-je ?
Laurie et moi étions l'une dans les bras de l'autre. Avant que finalement, nous ne finissions ma tête et que je ne coure faire les travaux ménagers.
Plus tard, à vingt-trois heures, mon père nous réunissait tous dans le salon.
On se regardait tous, le chant des moustiques qui circulaient animant la pièce.
Papa gifla son bras gauche grossièrement puis fixa le sang de la bestiole écrasé sur sa main. « Je l'ai eu ! »
Puis, il leva les yeux vers moi. « Angélique, je suis un homme sage. J'ai passé de très longues années sur cette terre et les décisions que je prends sont toujours les meilleurs. Ta mère s'est mariée jeune. Je l'ai prise, elle n'avait que quinze ans donc... tu as bien dépassé l'âge d'être traitée comme un bébé. Tu as déjà vingt ans. Va dans ta chambre et fais tes affaires. Va chez le père de ton enfant, que le voisinage ne nous critique pas. »
« Mais... »
« Mon mari a raison ! » maman poursuivait, arrangeant son pagne qui voulait révéler sa poitrine. « Sors ! C'est mieux. Sors ! »
Mais alors que je ne bougeais guère, Joseph me prit par les cheveux et me traîna dans la chambre. J'essayais de retirer ses mains, car la douleur du fil sur mes tresses était atroce, mais il me tapait les doigts.
Il me jeta ensuite sur le sol de la chambre, et mon fessier frappa la terre battue.
« Ramasse tes affaires. »
Mais devant mon inactivité, il appela, « Vivian ! Grace ! » Et lorsque ces deux vinrent, il leur ordonna, « ramassez ses affaires et mettez-la dehors. » Alors que je n'avais nulle part où aller et la maison de Laurie était déjà fermée.
Je tentais par conséquent de rester devant la porte, mais mes frères m'avaient frappé jusqu'à ce que je me décide enfin à partir. Même mon jeune frère avait osé lever la main sur moi.
Je marchais de ce fait, une fois de plus, dans la nuit. Étant une différente femme cette fois-ci. En effet, je ne craignais plus que le mal me fasse violence. Même la lourdeur du sac de voyage que je tenais ne me ralentissait pas. Une haine m'enflammait les veines.
Mes yeux étaient fixés droits vers moi, alors que je passais les maisons. Certaines d'entre elles étaient faites en terres lorsque d'autres étaient faites en bois. Certaines d'entre elles n'avaient aucune peinture, lorsque d'autres avaient des peintures presque déjà dégradées.
À deux heures du matin, je sortais enfin des pauvres quartiers et arrivais dans un endroit plus vivant. Il y'avait des bars l'autre côté de la route et de l'herbe haute où je me tenais.
Je me cachais donc dans un coin, fouillant une tenue pour la nouvelle moi.
J'avais majoritairement des vêtements couvrants. J'eus alors l'idée de prendre une de mes robes de nuits noires et de la portée avec des talons. Après tout, n'était-ce pas avec cette tenue que Obiang avait assassiné mes rêves ? Maintenant, j'allais rendre la pareille au monde avec le même type de vêtement.
Je déposais le sac entre une touffe d'herbe puis lançais un regard vers le ciel en larmes. « J'ai essayé... essayé de croire en une vie différente, depuis ce jour où j'ai rencontré ce jeune homme qui était venu en mission dans notre village. Il m'a parlé d'un Dieu qui vit tout là-haut dans le ciel et j'étais si émerveillée. J'ai voulu vivre d'une manière pure et saine afin de Te plaire. Je me suis même attiré les foudres des guérisseurs du village et de ma famille parce que je partais à l'encontre de nos croyances habituelles. Mais dis-moi... pourquoi ça ? Enceinte ? Violée ? Je suis fâchée contre Toi. Beaucoup trop ! Ma douleur est immense. Si immense que j'ai envie de m'ôter la vie.» Puis, je sortis des buissons et traversais la route.