Au commencement de l’année 1819, la vie lui fut plus cruelle que jamais. Au moment où elle s’applaudissait du bonheur négatif qu’elle avait su conquérir, elle entrevit d’effroyables abîmes. Son mari s’était, par degrés, déshabitué d’elle. Ce refroidissement d’une affection déjà si tiède et tout égoïste pouvait amener plus d’un malheur que son tact fin et sa prudence lui faisaient prévoir. Quoiqu’elle fût certaine de conserver un grand empire sur Victor et d’avoir obtenu son estime pour toujours, elle craignait l’influence des passions sur un homme si nul et si vaniteusement irréfléchi. Souvent ses amis la surprenaient livrée à de longues méditations ; les moins clairvoyants lui en demandaient le secret en plaisantant, comme si une jeune femme pouvait ne songer qu’à des frivolités, comme s’