Tu es mort pour moi.
Je regarde mes copines qui n'arrêtent pas de parler de la soirée que va donner Chanel une camarade mais je n'arrive pas à être aussi enthousiastes qu'elles ; pas que je n'aime pas la fête au contraire, juste que je n'aimerais pas croiser Yannick mon ex. Je sais c'est bête mais c'est ainsi...
Linda : alors Esti, tu vas mettre quoi pour ce soir ?
Moi : je ne suis pas sûre de pouvoir venir...
Carla : pardon ?
Moi : je ne me sens pas bien...
Linda : aca, laisse-nous ça ! Je suis sûre que c'est parce que ton idiot d'ex sera là...
Carla : vraiment !
Moi : vous ne pouvez comprendre !
Linda : en fait ce que je n'arrive pas vraiment à comprendre c'est comment tu peux laisser ce gars avoir autant de dessus sur toi ?
Carla : vraiment, il ne mérite même pas que tu penses encore à lui. Non mais tu m'énerve des fois je t'assure. C'est lui qui devrait se sentir mal en ta présence et pas le contraire.
Linda : tout à fait d'accord !
Je les regarde me sermonner un long moment en me demandant si elles n'ont pas finalement raison. C'est lui qui m'a fait du mal donc je n'ai pas à me cacher ou quoi que ce soit ; mais c'est tellement difficile parce que je ne saurais pas comment réagir. Depuis notre rupture, on ne s'est plus revu et voilà que je vais le revoir ce soir. Je sais déjà qu'il sera à cette soirée. Chanel est une amie en commun donc si je suis invitée forcément lui aussi l'est... Franchement les filles ont raison mais je ne préfère pas aller à cette soirée.
Moi : je suis désolée les filles mais c'est trop dur... Je ne peux pas.
Je lis la déception dans leurs yeux et j'en suis désolée mais là, il ne s'agit pas d'elle mais de moi. Je finis de ranger mais documents puis je prends congé d'elles avant qu'elles ne se lancent dans une autre partie de sermon.
Heureusement le premier taxi que je stoppe me prend. Depuis que les filles ont abordé le sujet, je n'arrête pas d'y penser. Et moi qui pensait que cette histoire était derrière moi ; finalement je vois que non : la blessure est toujours ouverte. Rien que le fait d'y penser, j'ai envie de pleurer.
Je l'aimais tellement, d'ailleurs je crois que je l'aime toujours... Je nous voyais déjà dans notre belle et grande maison avec nos quatre enfants fêtant nos dix ans de mariage avec nos familles et amis ; bref l'amour typique d'un roman à l'eau de rose. À la place, j'ai eu droit à une désillusion. Vous imaginez, vous vivez votre vie de rêve et puis soudain, vos yeux s'ouvrent et vous rendez compte que ce n'était qu'un rêve... Mon cas est pire car tout ce temps j'avais les yeux ouverts mais je n'ai rien vu venir. Il s'est tellement foutu de moi.
Taximan : mademoiselle vous êtes arrivé ou bien vous voulez dormir dans mon taxi ?
Ce n'est que maintenant que je remarque que je suis arrivée. Je m'excuse auprès du taximan et lui donne son argent. Tout le monde me dit que je devrais oublier et passer à autre chose mais comment ? Quand j'ai l'impression qu'il m'a tout pris : ma joie de vivre, mes rêves, mon amour propre... Tout ! Sniff ! Voilà que je me remets à pleurer.
Il faut que j'arrête de penser à lui, il le faut vraiment...
J'arrive chez moi quelques minutes plus tard. Une minuscule chambre que je loue à 10000F le mois. Je n'ai pas eu la chance de certains d'avoir la vie de palace ou des parents riches. Mes parents avant leur décès n'étaient que de pauvres cultivateurs ; heureusement mon oncle a eu pitié de moi après la mort de mon père (qui est parti cinq ans après ma mère) de prendre mes études en charge. Je suis en troisième année à l'Université aujourd'hui et je sais que je n'ai pas droit à l'erreur. Il a été très claire avec moi dès mon arrivée ici. Sa femme ne voulait pas de moi chez eux, alors il m'a pris cette petite chambre près de l'université et je ne m'en plains pas. D'ailleurs, si seulement il savait que j'ai hébergé un imbécile dans cette chambre qu'il me paye pendant près d'un an et que l'argent qu'il m'envoyait pour mes petits besoins je devais partager ça entre deux parce que j'étais maintenant "en couple" pfff ! De la folie, maintenant que j'y pense, mais que ne ferions-nous pas, par amour ?
Toute cette histoire m'affecte au point où j'ai de la peine à étudier. Il faut vraiment que j'arrête et que je me reprenne car je n'ai vraiment pas droit à l'erreur. Il faut que j'arrive à me sortir Yannick de la tête et ce n'est certainement pas en restant à la maison car ici je ne fais que penser à lui, au moins à cette fête je vais m'amuser et je ne serai pas obligée de rester à côté de lui. Tout compte fait, je vais aller à cette soirée... Je crois que ce sera aussi une bonne occasion pour lui montrer que je suis passée à autre chose.
J'appelle les filles pour leur dire que j'ai changé d'avis et comme je m'y attendais, elles en sont ravies. Elles ont prévu de passer chez moi pour qu'on s'apprête ensemble.
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C'est toutes vêtues de robes que nous arrivons à la soirée. J'ai opté pour une robe simple, évasée jusqu'au genou contrairement aux filles qui ont sorti le grand jeu. Je ne suis pas mal mais devant elles, je ne fais pas le poids et en fait je m'en fiche tant que je me sens à l'aise dans ma jolie robe ça va. Déjà que je dois supporter cette paire d'escarpins je n'allais pas rajouter une robe qui me serre. Je me trouve cool comme ça en plus de ma petite touche de maquillage nude... Les choses de Linda (rire).
On arrive dans la salle et elle est pratiquement pleine. Tout le monde est là on dirait. Chanel vient nous accueillir et nous emmène jusqu'à nos places respectives. Jusqu'ici, je n'ai pas encore vu la tête de l'autre donc ça me va.
Linda : regarde-toi comment tu es toute jolie, toi même tu n'étais pas fatiguée de ta routine école-maison ? Au moins ici, tu vas bien t'amuser...
Carla : je compte m'en assurer en tout cas. Je reviens les filles je vais saluer quelques personnes là-bas. Tiens voilà Luc...
Linda (surexcitée) : où ça ?
Carla : là-bas avec Chanel, je crois qu'il vient d'arriver. Bon je reviens...
Linda (à moi) : je te laisse ma poule, je vais voir mon petit Luc et puis je reviens.
Cette fille ne va jamais cesser de m'étonner, le gars ne la capte même pas mais dans sa tête c'est son "petit Luc" (rire). En tout cas, qu'elle persévère peut-être qu'un jour ça va donner.
: toujours aussi beau ton sourire.
À cet instant, j'ai l'impression que je manque d'air et je sens mon cœur qui se serre. Comment juste une voix peut avoir autant d'effets sur moi ? Je n'ai même pas envie de me retourner. Mon Dieu, faites qu'il s'en aille s'il vous plaît et puis elles sont même où Linda et Carla ?
Lui : alors tu ne vas même pas me saluer ?
Non mais il est sérieux ? Franchement je crois qu'il se fout vraiment de ma gueule. Reprend toi Esti, ne lui montre pas qu'il peut prendre le dessus sur toi.
Je me lève et me retourne pour me trouver face à lui. Cette fois mon cœur fait un boom dans ma poitrine et commence à battre très fort. Comment je peux ressentir toutes ces sensations après ce qu'il m'a fait ? Reprend toi Esti allez !
Moi (sourire jaune) : mais bien-sûr, salut !
Lui : tu es encore plus belle que dans mes souvenirs.
Moi : ok ! Bonne soirée à toi je vais passer un appel dehors
Lui : euh ok, on se revoit plus tard alors ?
Je ne réponds même pas et le dépasse. Non mais il se croit où à venir se placer devant moi et m'exposer son sourire comme si on était amis. Qu'est-ce qui ne tourne pas rond chez ce gars au fait. Le pire ce n'est même pas son attitude mais mon cœur de traitre qui réagit à sa présence pff ! J'ai vraiment besoin de prendre de l'air.
J'arrive au balcon et sans que je ne m'aperçoive, une goutte de larme coule le long de ma joue. Non pas aujourd'hui Estelle, pas maintenant ne le laisse pas croire qu'il a gagné.
: qu'est-ce qu'une aussi belle jeune femme fait toute seule ici ?
J'essuie rapidement cette larme puis me tourne vers mon interlocuteur qui captive bizarrement mon attention dès le premier regard. Peut-être à cause de son physique. Le genre de gars dont toutes les filles révéraient : beau, grand avec ses yeux marrons ; à voir son habillement, c'est clair qu'il doit être dans la trentaine et surtout responsable. En bref le gars parfait...
Moi : pardon ?
Lui : vous avez pleuré ?
Moi : euh non, c'est le vent qui est un peu fort ce soir...
M'a-t-il cru ? Ça m'étonnerait vu que même moi je ne me suis pas crue. (Rire)
Lui : ah oui, c'est vrai le vent est vraiment fort !
Il sourit en coin et je comprends qu'il sait que je lui mens et ça me fait rire en plus.
Lui : tu devrais rire plus souvent, tu as vraiment un beau sourire...
Moi : merci !
Lui : sinon, tu fais quoi dehors toute seule ?
Moi : je prends de l'air...
Lui : avec ce vent fort qui te fait couler des larmes ? (Rire)
Moi : arrête ! Ne te moque pas... Disons que ça me fait du bien.
Lui : ok, ça ne te dérangera donc pas que je profite aussi de ce vent avec toi...
Moi : euh... En même temps l'air et le vent ne m'appartiennent pas hein.
On éclate tous les deux de rire...
Lui : pas faux en plus... Tu es vraiment très drôle. Alors tu es une amie de Chanel ?
Moi : oui, et toi ?
Lui : j'ai l'âge d'être son ami ? (Rire)
Moi : bah pourquoi pas... A 28 ans on n’est pas vieux hein (bien-sûr que c'est une ruse pour connaitre son âge)
Lui (flatté) : merci de me rajeunir mais j'ai un gros 32 ans qui pèse sur ma tête et Chanel en a 22 comme toi je dirais...
Moi : c'est exact !
Lui : donc toi et moi on ne peut pas être amis... Dommage (rire)
Moi : à ce qui paraît l'amitié n'a pas d'âge
Lui : jusqu'à il y a deux secondes je pensais que la vraie phrase était l'amour n'a pas d'âge...
Moi : oui mais après il y a l'amour dans l'amitié noh
Lui : hummm toi là... Tu es très intéressante. Bref, je suis le grand-frère de Chanel... Tom
Moi : Estelle
Lui : aussi belle que ton nom...
Moi : merci !
On se regarde un moment sans rien dire, puis Linda vient me chercher.
Elle : eh, tu étais où depuis ? Ça fait un moment qu'on te cherche...
Tom : euh, je crois que je vais vous laisser...
On dirait que c'est à ce moment-là que Linda remarque sa présence.
Elle passe son regard de Tom à moi puis plisse les yeux.
Elle : euh, tu ne me présentes pas Esti ?
Moi : mais bien-sûr Tom voici Linda ma meilleure amie, Linda c'est Tom le grand frère de Chanel.
Elle : oulah, je ne savais pas que Chanel avait un frère aussi mignon massah le genre ci même s’il te dit de faire le tour du monde à minuit tu fais seulement. Mon père tu es beau tu comprends noh, Dieu t'a donné.
Tom la regarde tellement dépassé qu'il se contente juste de rire. Le pauvre !
Moi : Linda !
Elle : Linda quoi ? Dieu t'envoie un bel Apollon comme ça et toi tu es là à faire ta miss vraiment ça c'est le gaspillage de beauté. Tsuip mieux je retourne en salle vraiment.
Pendant qu'elle s'en va j'essaye de sourire pour dissimuler ma gêne mais vraiment celle-là hein...
Moi : je suis vraiment désolé !
Lui : il n'y a pas de quoi ! Elle est plutôt sympa ton amie... Bavarde oui mais sympa !
Moi : oui, c'est une bonne fille !
Lui : et toi ?
Moi : moi quoi ?
Lui : tu es quel genre de fille ?
Moi : euh...
Quand je veux répondre, Chanel arrive au même moment...
Elle à Tom : eh, je pensais que tu ne viendrais pas. Ah tu as rencontré Estelle (à moi) j'espère qu'il ne te dérange pas hein...
Moi : non t'inquiète...
Elle : cool, je te l'emprunte un moment s'il te plait.
Moi : pas de soucis.
Il me sourit et s'en va avec sa sœur alors que moi je reste là à sourire bêtement... Pourquoi même ?
: tu le rencontres à peine et tu ris déjà avec lui comme ça, après c'est pour finir dans son lit...
Je le regarde en m'imaginant toutes les façons de lui faire avaler sa langue mais je préfère le laisser planter là. Quand je veux partir il me retient...
Lui : Esti il faut qu'on parle s'il te plait...
Je me dégage de lui lentement pour ne pas attirer l'attention puis je le regarde droit dans les yeux pour être sûre qu'il va bien capter ce que je m'apprête à lui dire.
Moi : écoute bien ce que je vais te dire... Tu vois ce grain de poussière par terre ? Non ? Et bien sache que pour moi, tu es encore bien plus invisible. Ne fais plus jamais l'erreur de poser ce qui te sert de bras sur moi. Dès aujourd'hui, on ne se connait pas. Tu es mort pour moi. g****o.
Je le dépasse et vais retrouver les autres en salle. S’il pense pouvoir me pourrir ma soirée, il se trompe.
Je pensais chaque mot de ce que je lui ai dit, pour moi il n'est plus rien à partir d'aujourd'hui sinon je ne m'appelle pas Estelle Mbama.