QUELQUES JOURS PLUS TARD
RYANDA
C'est au pas de course que j'arrive ce matin à l'hôtel où je travaille. J'ai perdu énormément de temps à cause des embouteillages et j'espère que cela ne va pas me porter préjudice.
Je vais rapidement me changer et c'est juste à temps que j'arrive à mon poste de réceptionniste.
Ça fait déjà pratiquement trois mois que je travaille ici et jusqu'ici tout se passe bien pour moi. D'ailleurs mes trois mois d'essai se terminent dans quelques jours et il y a de fortes chances que je sois retenue.
Trouver le travail dans ce pays n'est pas facile du tout. J'ai fait des études de management et j'ai obtenu mon master avec une excellente moyenne mais me voilà réduite à n'être qu'une simple réceptionniste. Ce n'est pas faute d'avoir cherché ailleurs.
Le problème c'est que partout où tu vas déposer des dossiers, on te demande minimum trois ans d'expérience. Mais si vous ne nous laisser pas nos chances, comment donc allons-nous avoir ces expériences. Tout ça même généralement ils ont déjà leurs gens dans leur tête.
Donc j'ai abandonné de ce côté-là en me disant que tout ce que je trouverais désormais, je prendrais. J'ai donc vu une annonce dans le journal de cet hôtel qui avait besoin de deux réceptionnistes. Je suis allée déposer mes dossiers sans grande conviction et à ma grande surprise, j'ai été appelé pour un entretien suite auquel j'ai été mise à l'essai pour trois mois.
Donc là je suis à quelques jours de la fin de mon essai et j'ai hâte d'être retenue définitivement. Pour moi mais aussi pour ma mère qui se bat depuis des années pour que j'aie un avenir meilleur malgré sa situation précaire.
Ma mère est mon héroïne. Depuis toute petite, je l'ai vu se battre pour moi sans l'aide de personne. Je n'ai jamais connu mon père parce qu'il est mort alors que ma mère me portait encore en elle. C'est même ce qui à causé son accouchement précoce. Eh oui, je suis prématurée mais bon, on ne le dirait pas. Surtout que je n'ai pas eu de problème de santé grave.
Donc comme je le disais, je suis orpheline de père et ma mère a dû travailler deux fois plus pour que je ne manque de rien.
Aujourd'hui j'ai vingt-six ans ce qui signifie que je suis majeure et vaccinée. Du coup, je pense qu'il est temps que maman se repose et que je prenne les choses en main.
J'espère vraiment être retenue.
Je m'installe à mon poste et les clients commencent à défiler dans le hall de l'hôtel. C'est toujours comme ça le soir.
Nous somme deux réceptionnistes. L'une travaille de six heures à dix-huit heures et l'autre de dix-huit heures à six heures.
Donc aujourd'hui je travaille le soir et je déteste travailler le soir parce qu'il y a beaucoup trop de monde et on y voit tellement de choses. Heureusement que je ne suis là que pour mon travail.
J'allume mon ordinateur et entre dans ma fiche. Lorsque les clients arrivent vers moi, je prends la peine de les écouter et de leur proposer nos différents services. Bien-sûr je commence par les meilleurs services car plus ils payent cher mieux c'est pour moi. Ça fait aussi partie de nos statistiques.
Du coup je n'hésite pas à tout faire pour convaincre les clients de prendre de prendre des chambres plus coûteuse. C'est bon pour moi mais pour eux aussi parce que ça leur garanti un plus grand confort.
Pendant que je vérifie s'il y a encore des chambres au prix de la dame qui se tient devant moi, je remarque qu'il y a un monsieur qui me regarde avec insistance.
Je baisse rapidement mon regard vers mon ordinateur en évitant de croiser de nouveau son regard. Il est accompagné d'une jeune femme. Je ne comprends pas pourquoi il me regarde de cette façon. Bref, je ne suis pas là pour me faire distraire.
Moi : oui madame, il y'en a encore. Je valide ?
Elle : oui...
Je valide sa réservation et je fais appel à un des stewart (bagagiste) de l'hôtel pour qu'il accompagne la dame à qui je remets la clé de la chambre en question.
Le monsieur qui ne me lâche toujours pas du regard, s'emmène vers moi avec un air vraiment contrarié. Je me demande si on se connaît et qu'est-ce que j'ai bien pu lui faire pour qu'il m'adresse un tel regard.
Il arrive à mon niveau et commence à crier.
Lui : c'est vous hein ?
Je le regarde dans l'incompréhension totale.
Euh, c'est une mauvaise blague ou quoi ?
Lui : vous pensiez que je ne vous retrouverais pas. Mais vous avez eu tort. Vous allez tout de suite me remettre mon argent.
Je le regarde sans vraiment comprendre. Il me parle de quoi là alors que je ne le connais même pas.
Moi : mais de quel argent vous parlez monsieur ? Je ne vous connais même pas.
Lui : oui c'est ça, cache-toi derrière ton accoutrement là mais je t'ai bien reconnu. Sache que d'une manière ou d'une autre, tu vas me le payer.
Il tire sa compagne et s'en vont alors que je reste toujours là à m'interroger. Puis je souris lorsque je remarque tous ces regards sur moi.
Moi : désolé messieurs et mesdames pour cette petite incompréhension. Ce n'est rien du tout et je vous souhaite un bon séjour dans notre hôtel.
Ils poursuivent leur chemin et leurs activités et je pousse un ouf bien que je ne sois pas vraiment tranquille. Ce qui est sûr, le patron va être mis au courant de cet incident et j'ai peur pour mon avenir dans cet hôtel.
Mais c'est quoi cette histoire ? Pourquoi cet homme pense-t-il me connaître ? Alors que moi jamais je ne l'ai vu de toute ma vie. Si je l'avais vu je m'en souviendrais très certainement car je ne suis pas du genre à oublier un visage.
J'essaye de continuer mon travail bien que je ne sois pas vraiment à l'aise après ce qui vient de se passer.
(...)
Il est six heures et j'ai terminé ma soirée de travail. Malgré l'incident d'hier soir, le reste de la soirée s'est passé normalement. Malheureusement, je ne suis pas tranquille car je sais que cet incident va avoir des répercussions sur mon travail d'une manière ou d'une autre et d'ailleurs ça ne va pas tarder.
Hélène : Ryanda, le boss veut te voir dans son bureau.
Moi : je le savais !
Hélène : qu'est-ce qu'il y a ? Pourquoi tu fais cette tête ?
Moi : je vais d'abord le voir et ensuite je te raconte.
Hélène : ok !
Je prends mon sac après m'être changé et me dirige au bureau du chef du personnel de l'hôtel.
Moi : bonjour monsieur !, dis-je en entrant.
Lui : bonjour Ryanda, comment vous allez ?
Moi : bien monsieur.
Lui : asseyez-vous, je vous prie.
Je ne me fais pas prier et vais m'asseoir.
Lui : qu'est-ce qui s'est passé hier soir ?
Moi : euh monsieur, en fait, pendant mon service, il y a un monsieur qui est arrivé et a commencé à me crier dessus en m'accusant de lui avoir volé de l'argent alors que je ne le connais même pas. Je suis sûre de ne l'avoir jamais vu.
Lui : pourtant ce n'est pas ce que lui il dit.
Moi : je vous promets monsieur que je ne connais pas cet homme.
Lui : le problème c'est qu'il s'agit d'un client important de l'hôtel et nous ne pouvons pas nous permettre de le perdre. Je suis vraiment désolée parce que je vous ai observé pendant ces trois mois et vous étiez plus qu'à la hauteur et je sachez que ça ne me plaît pas de faire ça mais je n'ai pas le choix. Ce monsieur a demandé à ce que tu sois renvoyée.
Moi : mais monsieur... Je vous promets que je n'ai rien fait de ce que cet homme m'accuse. Je ne le connais même pas.
Lui : peut-être bien mais bon... Ce qu'on va faire c'est que je vais vous remettre la carte d'un ami. Vous allez l'appeler et vous lui direz que vous l'appeler de ma part. Il va vous trouver du travail. Et prenez aussi cette enveloppe. Prenez ça comme un dédommagement. Je suis vraiment désolé mais c'est tout ce que je peux faire pour vous.
Moi : merci monsieur.
Je me lève et sors de son bureau après avoir pris la carte et l'enveloppe.
Bien évidemment que je suis déçue. Mais alors déçue de ouf.
Je sors de l'hôtel non sans me poser de questions sur ce qui ne tourne pas rond chez moi. Alors que j'étais à rien de signer un CDI, voilà que ça ça m'arrive.
Comment vais-je pouvoir l'expliquer à maman qui se tue déjà tellement à la tâche pour moi chaque jour. Je vais tellement la décevoir.
Je décide de marcher un peu avant de prendre un taxi pour la maison. En marchant, je m'arrête sur un banc public et m'assois.
J'observe les gens qui passent devant moi. Tous bien habillés. Ils doivent sans doute se rendre chacun dans son lieu de service. Quand je pense que cette routine est finie pour moi. Ou peut-être pas.
Je repense automatiquement à la carte que m'a remis mon ex patron et j'appelle aussitôt le monsieur qui me fait savoir qu'il attendait mon appel. Il me demande également de passer le lendemain pour un entretien.
Mais le problème... C'est dans un autre royaume.
Je dis oui sans plus et je file rapidement à la maison pour être sûre d'être au rendez-vous demain matin.
J'arrive à la maison et lorsque je vois maman, je change ma mine et affiche un faux sourire et une fausse joie.
Moi : bonjour maman !
Maman : bonjour Rya qu'est-ce qui te met de si bonne humeur ?
Moi : tu ne devineras jamais maman...
Maman : tu as gagné au loto ?
Moi : mamaaaan... Mais non, en fait ma période d'essai a été un succès et j'ai obtenu un poste mieux que celui auquel je m'attendait.
Maman : vraiment ?
Moi : oui maman, je passe de réceptionniste à gérante. Mais le problème c'est que c'est au royaume de l'Ouest.
Maman : pourquoi loin là-bas ?
Moi : ils ont besoin d'une gérante dans leur hôtel là-bas donc ils ont pensé à moi. C'est l'opportunité de ma vie maman.
Maman : je comprends. Et tu dois y être quand ?
Moi : demain matin !
Maman : oh mais ça ne te laisse même pas le temps de te préparer.
Moi : je pars d'abord prendre fonction et puis je reviendrai pour prendre mes affaires.
Maman : d'accord ! Je suis tellement fière de toi. Enfin, Dieu a entendu mes prières.
Elle me prend dans ses bras et me serre très fort. Je peux ressentir toute la joie qu'elle ressent et je m'en veux encore plus de lui mentir. Je ne pouvais pas supporter de lire la peine dans ses yeux lorsque je lui aurais annoncé que j'ai été remercié. Il ne me reste plus qu'à espérer que tout se passe bien demain.
Je ne sais même pas encore ce qui m'attend là-bas ni si je vais vraiment être retenue.
Mon Dieu, venez-moi en aide.