Chapitre XV Les yeux bleus« Le corps et le cœur », dit le roi à Zadig… À ces mots, le Babylonien ne put s’empêcher d’interrompre Sa Majesté. « Que je vous sais bon gré, dit-il, de n’avoir point dit l’esprit et le cœur ! car on n’entend que ces mots dans les conversations de Babylone ; on ne voit que des livres où il est question du cœur et de l’esprit, composés par des gens qui n’ont ni de l’un ni de l’autre ; mais, de grâce, Sire, poursuivez. » Nabussan continua ainsi : « Le corps et le cœur sont chez moi destinés à aimer ; la première de ces deux puissances a tout lieu d’être satisfaite. J’ai ici cent femmes à mon service, toutes belles, complaisantes, prévenantes, voluptueuses même, ou feignant de l’être avec moi. Mon cœur n’est pas à beaucoup près si heureux. Je n’ai que trop éprouvé