Chapitre IV L’envieuxZadig voulut se consoler par la philosophie et par l’amitié des maux que lui avait faits la fortune. Il avait, dans un faubourg de Babylone, une maison ornée avec goût, où il rassemblait tous les arts et tous les plaisirs dignes d’un honnête homme. Le matin, sa bibliothèque était ouverte à tous les savants ; le soir, sa table l’était à la bonne compagnie ; mais il connut bientôt combien les savants sont dangereux. Il s’éleva une grande dispute sur une loi de Zoroastre qui défendait de manger du griffon. « Comment défendre le griffon, disaient les uns, si cet animal n’existe pas ? – Il faut bien qu’il existe, disaient les autres, puisque Zoroastre ne veut pas qu’on en mange. » Zadig voulut les accorder, en leur disant : « S’il y a des griffons, n’en mangeons point ; s’