IV

350 Words
IV – Eh bien, et vous, Féréol ? demanda Jacques. Comment vous êtes-vous tiré de ce mauvais pas ? – Un zeu ! mes enfants, un zeu ! mais touzours ma présence d’esprit. Donc ze quittai Masseille et z’avais le cœur plein l’une çarmante créature qui m’avait fait passer, la veille au soir, un instant d’inoubliable volupté. Nous roulions en wagon, Claudius et moi, avec un autre monsieur que nous ne connaissions ni l’un ni l’autre. Ze contais ma çance à Claudius qui me regardait avec des yeux de rascasse, électriques et phosphorescents. – Té, qu’il me dit, puisque tu quittes Masseille pour touzours, dis-moi qui c’est cette femme, que ze puisse en profiter. – Impossible, que ze lui réponds. Trahir un anze pareil ! Ce serait abominable. – Allons, voyons, puisque ze te promets que ze ne le dirai pas, tu seras tranquille ! – C’est bien pour toi seul au moins ? – Ze te le zure ! – Eh bien non !… Ce mâtin de Claudius m’offrit un cigare, un cigare écellent qui sentait la noisette. Ze pris le cigare et ze me dis : – Tu peux le contenter un peu. – Ze ne te dirai pas son nom, repris-ze, mais seulement où elle demeure. Cour Belzunce, première maison à gauçe. Le monsieur que nous ne connaissions ni l’un ni l’autre se retourna. Claudius me dit : – Situ me dis son nom, ze te donnerai le Petit Journal. Il savait, la coquinasse, que ze lisais le feuilleton. – Zamais ! que ze lui fais. Z’aimerais mieux être coupé en quatre. – Tà, alors tu ne sauras pas ce qu’est devenue la belle Arzentière !… Ze n’y tenais plus. – Elle s’appelle Mme Capoulade, que ze lui dis. Troun de l’air ! Le monsieur que nous ne connaissions ni l’un ni l’autre bondit comme une flèçe et se dressant devant moi : – Pardoun, Monsieur, c’est moi que ze suis M. Capoulade. Il y avait de quoi être foudroyé. Mais ma présence d’esprit était là. – Mes compliments, Monsieur, que ze lui réponds. Z’ai connu bien des femmes, mais aucune de si agréable que la vôtre. Ençanté de ma courtoisie, M. Capoulade se rassit en s’excusant. C’est lui qui était foudroyé. Et Féréol ajouta cette façon d’aphorisme destiné évidemment, dans son esprit, à fixer irrévocablement la jurisprudence en cette matière : – Quand on a fait une bêtise, il faut touzours savoir la raçeter par une politesse. L’amant interrompu
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