CHAPITRE CINQ

1651 Words
CHAPITRE CINQ Scarlet Paine sentait qu'elle flottait en l'air. En se sentant soulevée de plus en plus haut, elle entendait un million de petites ailes. Elle regarda et vit qu'elle était soulevée par une volée de chauves-souris, un million de chauves-souris qui l'entouraient et la transportaient en l'air en la tenant par l'arrière de sa chemise. Elle firent traverser la couche des nuages à Scarlet, qui vit alors le plus beau lever de jour qu'elle ait jamais vu. Les nuages s'éparpillaient et se dispersaient. La totalité du ciel orange-brûlé était en feu. Elle ne comprenait pas ce qui se passait mais, d'une façon ou d'une autre, elle n'avait pas peur. Elle sentait que les chauves-souris l'emmenaient quelque part et, pendant qu'elles poussaient des cris stridents et battaient des ailes tout autour d'elle en la soulevant vers le ciel, elle avait l'impression d'être des leurs. Avant que Scarlet ait pu comprendre ce qui se passait, les chauves-souris la déposèrent doucement devant le château le plus grand qu'elle ait jamais vu. Il avait d'anciens murs de pierre et elle se tenait devant une immense porte cintrée. Les chauves-souris s'envolèrent au loin, disparurent et leurs battements d'ailes de dissipèrent. Scarlet se tenait face à la porte, qui s'ouvrit lentement. Une lumière ambrée en sortait et Scarlet eut envie d'entrer. Scarlet passa le seuil, traversa la lumière et entra dans la salle la plus grande qu'elle ait jamais vue. A l'intérieur se tenait une armée de vampires tous vêtus de noir. Il se tenaient tous face à elle, parfaitement au garde-à-vous. Elle plana au-dessus d'eux et les regarda comme si elle était leur chef. Comme un seul homme, ils levèrent tous la main et se la claquèrent contre la poitrine. “Vous avez engendré une nation”, tonitruèrent-ils d'une seule voix que les murs firent résonner. “Vous avez engendré une nation !” Les vampires poussèrent un grand cri et, quand ils le firent, Scarlet comprit toute la scène et eut l'impression d'avoir finalement trouvé son peuple. Scarlet ouvrit brusquement les yeux quand elle fut réveillée par un son de bris de verre. Elle se retrouva allongée face au ciment, les joues poussées contre le matériau froid, mouillé et humide. Elle vit des fourmis marcher vers elle, plaça les mains contre le ciment brut, se releva et se débarrassa des fourmis. Scarlet avait froid et mal partout. Elle s'était tordu le cou et le dos en dormant dans cette position inconfortable. Elle était surtout perdue et angoissée parce qu'elle ne reconnaissait pas ce qui l'entourait. Elle était en dessous d'un petit pont des environs, allongée sur la pente en ciment qui se trouvait en dessous. Le jour se levait au-dessus d'elle. L'endroit puait l'urine et la bière éventée et Scarlet vit que le ciment était tout couvert de graffiti. Quand elle regarda par terre, elle vit des cannettes de bière vides, des déchets et des seringues usagées. Elle comprit qu'elle était dans un endroit peu recommandable. Elle regarda autour d'elle en clignant des yeux. Elle ne savait pas où elle était, ni comment elle était arrivée ici. Elle entendit encore un son de bris de verre suivi par des pas traînants. Elle se retourna vite, les sens en alerte. A environ trois mètres se tenaient quatre clochards en haillons. Ils avaient l'air ivres, drogués ou seulement assoiffés de violence. C'étaient des hommes âgés non rasés et ils la regardaient comme si elle était leur jouet. Derrière leur sourire libidineux, on voyait des dents jaunes gâtées. Cependant, Scarlet voyait qu'ils étaient forts, larges et grands et, quand l'un d'entre eux jeta une bouteille de bière pour la briser sous le pont, elle comprit à leur façon d'approcher que leurs intentions n'étaient pas bonnes. Scarlet essaya de se souvenir comment elle était arrivée ici. C'était un endroit où elle ne serait jamais allée de son plein gré. L'avait-on emmenée ici ? Elle se dit d'abord qu'on l'avait peut-être violée mais elle regarda vers le bas, se vit entièrement habillée et sut que ce n'était pas ça. Elle réfléchit en essayant de se souvenir de la nuit d'avant. Cependant, tout était confus et douloureux. Scarlet ne se souvenait que de moments extrêmement brefs : un bar sur le bord de la Route 9 … une altercation … mais tout était si confus. Elle n'arrivait pas à bien se souvenir des détails. “Tu sais que tu es sous notre pont, OK ?” dit un des clochards pendant qu'ils se rapprochaient tous de plus en plus. Scarlet se recula à quatre pattes puis se leva, se tint face à eux, tremblant intérieurement mais refusant d'avoir l'air effrayée. “Personne ne vient ici sans payer la taxe”, dit un autre. “Je suis désolée”, dit-elle. “Je ne sais pas comment je suis arrivée ici.” “C'est ton problème”, dit un autre d'une voix grave et gutturale en lui souriant. “S'il vous plaît”, dit Scarlet en essayant d'avoir l'air forte mais d'une voix tremblante et en reculant. “Je ne veux pas d'ennuis. Je m'en vais, maintenant. Je suis désolée.” Scarlet se retourna pour partir, le cœur battant la chamade dans sa poitrine, quand, soudain, elle entendit quelqu'un courir puis sentit un bras s'enrouler autour de sa gorge. Il y avait un couteau contre sa gorge et une affreuse haleine qui empestait la bière lui soufflait sur le visage. “Non, chérie”, dit-il. “On n'a même pas commencé à faire connaissance.” Scarlet se débattit mais l'homme était trop fort pour elle et sa barbe de trois jours lui grattait la joue pendant qu'il frottait son visage contre le sien. Bientôt, les trois autres apparurent devant elle et Scarlet cria en se débattant en vain. Ensuite, elle sentit leurs mains affreuses descendre vers son ventre. L'un d'eux lui attrapa la ceinture. Scarlet rua et se tortilla en essayant de s'enfuir, mais ils étaient trop forts. L'un d'eux tendit le bras vers le bas, lui arracha sa ceinture et la jeta. Elle entendit le bruit métallique sur le ciment. “S'il vous plaît, laissez-moi partir !” cria Scarlet en se tortillant. Le quatrième clochard tendit la main vers le bas, saisit son jean par la taille et commença à tirer dessus en essayant de le lui arracher. Scarlet savait que, si elle ne faisait pas quelque chose, elle souffrirait dans quelques moments. Quelque chose se rompit en elle. Elle ne comprit pas ce que c'était mais cela la submergea complètement. L'énergie l'inonda, s'éleva de ses pieds, remonta par ses jambes et son torse. Elle avait l'impression que c'était une chaleur cuisante qui se précipitait dans ses épaules, ses bras et jusqu'au bout des doigts. Elle rougit, les poils se dressèrent partout sur son corps et elle sentit un feu la consumer de l'intérieur. Elle sentait une force qu'elle ne comprenait pas, se sentait plus forte que tous ces hommes, plus forte que l'univers. Ensuite, elle ressentit autre chose : une rage primordiale. C'était une nouvelle sensation. Elle ne voulait plus s'en aller. Maintenant, elle voulait rester ici et faire payer ces hommes. Les tailler en pièces, membre par membre. Puis, finalement, elle sentit une autre chose : la faim. Une faim profonde qui la rongeait et lui donnait envie de se nourrir. Scarlet se pencha en arrière, grogna et le son lui fit peur, même à elle. Ses dents se prolongèrent en crocs. Elle se pencha en arrière et donna un coup de pied à l'homme qui voulait lui enlever son jean. Le coup de pied était si v*****t qu'il envoya l'homme voler en l'air à plus de six mètres jusqu'à ce que sa tête heurte le mur en béton. Il s'effondra, inconscient. Les autres reculèrent, relâchèrent leur étreinte, la bouche ouverte, choqués, effrayés. Ils regardèrent Scarlet et semblèrent comprendre qu'ils venaient de commettre une très grosse erreur. Avant qu'ils puissent réagir, Scarlet tourna sur elle-même et donna un coup de coude à l'homme qui la retenait. Elle le frappa si fort à la mâchoire qu'il fit deux tours sur lui-même et s'écroula, inconscient. Scarlet se retourna en grognant et fit face aux deux autres comme une bête qui contemple sa proie. Les deux clochards restèrent sur place, les yeux écarquillés de peur. Scarlet entendit un bruit, regarda vers le bas et vit l'un d'eux pisser dans son pantalon. Scarlet tendit la main vers le bas, ramassa sa ceinture par terre et s'avança avec désinvolture. L'homme tituba vers l'arrière, pétrifié. “Non !” gémit-il. “S'il te plaît ! C'était pour rire !” Scarlet fit un mouvement brusque en avant et enroula la ceinture autour de la gorge de l'homme. Ensuite, elle le souleva d'une main. Les pieds de l'homme pendirent en l'air et l'homme haleta en attrapant la ceinture. Elle le tint très haut jusqu'à ce qu'il s'arrête finalement de bouger et s'effondre, mort. Scarlet se retourna vers le dernier clochard, qui pleurait, trop effrayé pour s'enfuir. Tous crocs dehors, elle s'avança et les plongea dans la gorge de l'homme. Il trembla dans ses bras puis, en quelques moments, il se retrouva flasque dans une mare de sang. Scarlet entendit une précipitation distante. Elle jeta un coup d’œil et vit le premier clochard se lever en gémissant et se relever lentement. Il la regarda, les yeux écarquillés de peur, et se sauva à quatre pattes en essayant de s'enfuir. Elle se rua sur lui. “S'il te plaît, ne me fais pas de mal”, gémit-il en pleurant. “Je ne voulais pas le faire. Je ne sais pas ce qui tu es mais je ne voulais pas le faire.” “J'en suis sûre”, répondit-elle d'une voix grave et inhumaine. “Moi non plus, je ne veux pas faire ce que je vais te faire.” Scarlet le souleva par l'arrière de sa chemise, se retourna et le lança de toutes ses forces vers le haut. Le clochard s'envola comme un missile jusqu'au dessous du pont. Sa tête et ses épaules traversèrent le ciment avec fracas et la moitié de son corps ressortit de l'autre côté du pont. On entendit les décombres retomber partout. Il resta suspendu là, coincé. Ses jambes pendaient en dessous. Scarlet se rendit sur le pont d'un seul bond et elle le vit. Il avait le haut du torse coincé dans le béton. Il hurlait, la tête et les épaules exposés, incapable de remuer. Il se tortillait en essayant de se dégager. Cependant, il ne le pouvait pas. Il était une cible facile pour la première voiture qui arriverait. “Sors moi d'ici !” demanda-t-il avec autorité. Scarlet sourit. “La prochaine fois, peut-être”, dit-elle. “Bonne circulation.” Scarlet se retourna, bondit et s'envola dans le ciel. Le son des cris de l'homme se fit de plus en plus distant à mesure qu'elle s'élevait, s'éloignait de cet endroit. Elle ne savait pas où elle était et elle n'en avait que faire, à présent. Elle ne pensait qu'à une seule personne : Sage. Dans sa tête, son visage planait en face du sien, son menton et ses lèvres parfaitement ciselés, ses yeux mélancoliques. Elle sentait l'amour qu'il avait pour elle et elle en avait autant pour lui. Elle ne savait plus où elle habitait dans ce monde mais elle n'en avait que faire tant qu'elle était avec lui. Sage, pensa-t-elle. Attends-moi. Je viens te chercher.
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