V Dépit J’étais fatigué, et pourtant je ne pus dormir. Je comptai les heures sans réussir à résumer les émotions de ma soirée et à conclure avec moi-même. Il n’y avait qu’une chose certaine pour moi, c’est que je n’aimais plus la duchesse, et que j’avais failli faire une lourde école en m’attachant à elle ; mais une âme blessée cherche vite une autre blessure pour effacer celle qui mortifie l’amour-propre, et j’éprouvais un besoin d’aimer qui me donnait la fièvre. Pour la première fois, je n’étais plus le maître absolu de ma volonté ; j’étais impatient du lendemain. Depuis douze heures, j’étais entré dans une nouvelle phase de ma vie, et, ne me reconnaissant plus, je me crus malade. Je ne l’avais jamais été, ma santé avait fait ma force ; je m’étais développé dans un équilibre inappréci