LXV Au fond d’une vallée sauvage du versant méridional des Pyrénées, une misérable bourgade composée d’une trentaine de maisons et d’une posada, ce qui, en espagnol, veut dire cabaret, s’étale aux deux côtés de la grande route qui mène de Bayonne à Pampelune. C’est Corta, le village dont parlait mademoiselle Conception dans sa dernière lettre au prétendu marquis de Chamery. La population de Corta se compose en grande partie de muletiers, les uns vivant en paix avec la double douane des frontières, les autres vivant du périlleux métier de contrebandier. Le jour, au seuil des portes, on voit les hommes roulés, hiver ou été, dans leur manteau, fumant leur cigarette et, couchés sur le dos, contemplant le ciel bleu. Les enfants au brun visage, aux cheveux en broussaille, demi-nus, se roulent