CHAPITRE VIII Un parfum de café grillé – de vrai café, pas de café de la Victoire – venait de quelque part au bas d’un passage et flottait dans la rue. Winston s’arrêta involontairement. Il retrouva, peut-être deux secondes, le monde à moitié oublié de son en- fance. Puis une porte claqua, qui sembla couper l’odeur aussi brusquement que s’il s’agissait d’un son. Il avait, pendant plusieurs kilomètres, marché sur des pa- vés, et son ulcère variqueux lui donnait des élancements. C’était la seconde fois, en trois semaines, qu’il manquait une soirée au Centre communautaire. C’était une grave imprudence, car on pouvait être certain que les présences au Centre étaient soi- gneusement contrôlées. En principe, un membre du Parti n’avait pas de loisirs et n’était jamais seul, sauf quand il était