Chapitre 24 : C'est à toi de jouer

1639 Words
Hôpital GMC — Boston Jade Je n'ai pas le courage d'ouvrir les yeux et d'affronter la réalité, mon monde est rempli de ténèbres et j'ai le sentiment que personne ne peut me sauver, pas même mes parents. — Comment peut-on détester quelqu'un que l'on a aimé si intensément ? — J'entends la voix de Jean dans mes rêves, je n'arrive pas à le faire sortir de mes rêves, ni de mes cauchemars, depuis deux ans. Tout est très confus, j'entends des voix, on parle autour de moi et pendant un moment, je crois entendre la voix de ma mère, qu'est-ce qu'elle fait ici ? Je suis à Boston et ma mère est à Paris. Je suis venue dans cette ville parce que j'avais besoin d'échapper à tout et de me réfugier dans les bras de ma seule amie, Amélie. Et même si je savais que Jean n'était pas loin et que la tentation de le chercher était immense, j'ai décidé de venir. J'ouvre les yeux et regarde autour de moi, ma mère parle à quelqu'un que je n'arrive pas à identifier, je me sens un peu perdue, comme si je sortais d'une forte gueule de bois. Près de la fenêtre, je remarque un canapé et une chaise à côté de mon lit. Tout est blanc, stérile et le bruit d'une machine s'intensifie. Bang, bang, bang ! Est-ce que ce sont les battements de mon cœur ? Je ferme à nouveau les yeux et porte la main à mon ventre. Je me souviens de la dispute, de l'attaque au couteau et surtout de mon bébé, celui que j'ai essayé de protéger. Est-ce que ça a marché ? Je dois être courageuse, me concentrer et affronter la réalité. J'ouvre les yeux, un pas après l'autre. — Maman ? — Ma voix est faible, je déteste me sentir comme ça, comme ces derniers mois. Je touche mon ventre, je dois savoir ce qui s'est passé — Maman, où est mon bébé, l'ai-je perdu ? — Ma mère, que je ne reconnais presque pas quand je la vois vêtue d'une blouse chirurgicale jetable, d'un bonnet et d'un masque, s'approche de moi. Ma poitrine me fait très mal, à tel point que j'ai du mal à parler. — Je suis desolée, ma vie. — Je ne supporte pas d'entendre ce nom, pas après l'avoir perdu. — Docteur ? — Je m'adresse à l'homme dont je ne vois que le dos, je dois parler très calmement, j'ai mal ! — Calme-toi, Jade ! — Je retiens mon souffle en entendant sa voix et en voyant son visage. Jean ! Je le vois se tourner vers moi, je ferme les yeux, car je n'en peux plus. Je sens les larmes glisser doucement sur mes joues. — Je l'ai perdu, n'est-ce pas ? — Il acquiesce et un nœud de douleur, de colère et d'impuissance me prend à la gorge, alors que je regarde ses yeux bleus et que je réalise que je suis toujours prisonnière de son regard et de sa lumière, même s'il pense ne posséder que les ténèbres. — Me détestes-tu à ce point ? — Je lui demande et le regarde froncer les sourcils. — Qu'est-ce que cet homme fait ici, c'est lui qui a fait l'intervention ? — Mon père entre en trombe dans la pièce et frappe Jean au visage. Jusqu'à présent, je n'ai pas réussi à lui faire comprendre ce qui s'est passé il y a deux ans et avec tout ce qui s'est passé ces dernières années, mes parents sont de plus en plus nerveux, mal à l'aise et inquiets pour moi. — Monsieur Leblanc, j'ai déjà tout expliqué à votre femme et si vous n'êtes pas content de ce qui s'est passé, vous avez le droit d'en parler à mes supérieurs — Jean s'exprime de manière froide et contrôlée, il me regarde et j'ai l'impression d'être devant un iceberg. — Je suis vraiment désolé pour votre perte et celle de votre compagne. — Il me dit avant de quitter ma chambre. J'essaie de me calmer, ma poitrine me fait mal au moindre effort. — Étais-tu enceinte ? Je ne comprends pas ce qui t'arrive, Jade — Mon père s'assoit sur le canapé et porte les deux mains à sa tête dans une expression d'impuissance. — Tu as disparu pendant des mois et soudain on nous appelle pour nous dire que tu vas être opérée, que tu as reçu un coup de couteau dans le cœur et que tu as survécu par miracle. — Je porte ma main à ma poitrine, j'ai tellement mal et je ne peux pas m'empêcher de pleurer. Ces derniers mois ont été un enfer pour moi et bien que j'aie essayé de tout cacher à mes parents, il semble que je n'y sois pas parvenue. — Ne lui parle pas comme ça, Christophe — Ma mère essaie de me défendre, mais je suis consciente que mon père a raison, je ne suis plus la même Jade qu'il y a quelques mois. — Je suis désolée, je suis désolée qu'après tant de mois, nous nous retrouvions dans ces circonstances — leur dis-je en essayant de garder mon calme et de parler autant que nécessaire. Ma mère me tient la main, c'est elle qui me fait le plus souffrir, parce que je sais qu'elle a confiance en moi. — Que se passe-t-il, Jade ? — Je ferme les yeux, je ne peux pas lui dire ce qui se passe. Tu es de nouveau avec Meyers, c'est lui le père de ton enfant ? — Je savais que mes parents ne laisseraient pas passer quelque chose d'aussi important. — Papa. Je suis désolée, vraiment. Je... — Je n'arrive pas à respirer et ma poitrine me fait mal, et le pire, c'est que la douleur est de plus en plus forte. — Vous la perturbez, dans son état, ce n'est pas conseillé, alors je vais vous demander de partir, s'il vous plaît. — Je lève la tête en entendant la voix grave de Jean. Il est revenu ! — Pourquoi devrais-je t'écouter ? tu as foutu en l'air la vie de ma fille il y a deux ans, tu l'as kidnappée et forcée à t'épouser et sa vie est devenue ça, quelque chose d'incompréhensible — D'habitude mon père n'est pas comme ça et il ne s'adresse à personne de cette façon, c'est la personne la plus diplomate que je connaisse, mais apparemment, je l'ai poussé dans ses derniers retranchements. — Papa, ne lui parle pas comme ça. C'est toi qui m'as opéré ? — Jean, acquiesce, les bras croisés, je meurs d'envie de voir les mèches de ses cheveux blonds, mais il les porte recouverts d'un bonnet. — J'imagine donc que c'était une situation très grave. Tu sais que Jean s'occupe habituellement de chirurgies très compliquées, papa ? — Je ne sais pas pourquoi je le défends, nous ne sommes pas amis, même si je suis sûr qu'il a fait tout ce qu'il pouvait pour que mon bébé vive. D'ailleurs, les choses ne sont pas très claires pour moi. Je souffre beaucoup, physiquement et moralement, et je ne sais pas comment je vais reprendre ma vie en main, presque à partir de zéro. — Je ne vais pas parler de Meyers, alors dites-nous, qui est le père de ton bébé, Jade ? — Si mon père savait que la dernière chose que je voulais faire était de me souvenir de cet homme, et encore moins de lui dire qui il est, il ne me le demanderait pas. J'ai l'impression d'être torturée. — Monsieur Leblanc, je suis... — Jean tousse avant de finir sa phrase et reprend. — J'étais le père — dit-il avec assurance. Je le regarde, impressionnée, car il ne sait pas dans quel pétrin il vient de se mettre et je ne comprends pas pourquoi il le fait. Cela fait deux ans que nous ne nous sommes pas vus et je suis sûre qu'il me déteste comme personne d'autre dans sa vie, je pouvais le voir dans ses yeux. — C'est une p****n de blague ? — Mon père s'approche de Jean qui bloque la porte de la chambre et je souffre tellement que je n'arrive même pas à dire un mot. — Christophe ! — Ma mère lui fait de l'œil. Je suis abasourdie par la réaction de mon père. D'habitude, c'est ma mère qui s'enflamme comme de la poudre, pas lui. — Monsieur, je vais devoir vous demander de sortir, s'il vous plaît. — Réussit à entrer dans la chambre une des infirmières qui s'approche de mon père pour lui demander de sortir. La porte de la chambre est ouverte et j'ai l'impression que nous sommes trop nombreux dans ce petit endroit. — Je suis désolé, Dr Meyers — L'infirmière se tourne vers Jean, le reconnaissant. — Pas de problème, M. Leblanc s'en va tout de suite. — Répond Jean. Mon père déteste qu'on le garde et je suis sûre qu'il aurait répondu si ce n'était du fait que nous sommes en réanimation et que Jean est l'un des médecins présents. — Nous reviendrons plus tard, ma chérie — Ma mère m'embrasse sur le front et pousse mon père, qui n'a pas cessé de fixer Jean d'un regard fixe et pénétrant, hors de la pièce. — Nous en reparlerons — dit-elle avant de quitter la chambre accompagnée de l'infirmière. — Jean, merci pour... — Tes remerciements ne m'intéressent pas et encore moins de savoir qui est le père de ton bébé — me dit-il en s'approchant de la porte — Tout était clair entre nous, il y a deux ans. Remets-toi vite ! — Je déglutis difficilement devant son ton glacial et j'essaie de ne pas pleurer à cause de la douleur dans ma poitrine et surtout de toute la tristesse que je ressens.
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