« C’était quoi, un rêve ? » je lèche mes lèvres sèches à force d’avoir hurlé ma jouissance. Je veux savoir. Un rêve ? Un fantasme ? Une envie viscérale depuis longtemps enfouie et toujours ignorée ? J’ai rêvé qu’on me sautait et qu’on me donnait une fessée, il n’y avait pas un homme mais deux. J’ai eu l’o*****e le plus intense de toute ma vie.
« Oh non ma chère, m’informe la gardienne. C’est le rituel d’accouplement enregistré d’une autre épouse humaine. Cet enregistrement date de plusieurs années, il s’agit d’une épouse que j’ai envoyée là-bas au tout début du programme. »
Le visage de la gardienne Egara arbore un léger sourire, le premier que je lui vois depuis que nous sommes entrées dans ce bâtiment, depuis plusieurs jours désormais. Elle est toute dévouée à son job. Très impliquée, comme si elle tirait un intérêt personnel de la joie qu’elle apporte à chacun des guerriers célibataires de la galaxie.
« Vous voulez dire… que je ? C’était … quoi ? » Qu’est-ce que je dis là ? « C’était réel ?
– Oh, oui. Les neuro-processeurs utilisés par le système de recrutement seront intégrés dans votre corps durant l’étape finale en vue du transport. Les neuro-processeurs vous permettront de comprendre et de parler leur langue ; ils sont également programmés pour enregistrer votre propre cérémonie d’accouplement afin qu’elle soit à son tour répertoriée dans le but d’aider d’autres épouses lors de leur propre accouplement. Tout comme l’expérience d’autres femmes a servi pour votre accouplement. »
Je frémis, j’aimerais rester seule ici quelques minutes encore, dans ce rêve éveillé. J’ai encore envie. J’en meurs d’envie. « Mon partenaire ressemblera à ça ? » Je n’en suis pas certaine. Je n’ai jamais vu son visage mais je sais. Je sais que j’ai envie de lui. Ou d’eux.
Deux hommes ? Ça me laisse perplexe.
« Il y avait deux hommes. J’ai été accouplée à deux hommes ? »
Elle secoue la tête. « Non. Vous n’êtes accouplée qu’à un seul homme. Votre partenaire principal sera un guerrier, mais pas ce guerrier-là. »
Qu’est-ce qu’elle veut dire par partenaire principal ?
Je frissonne, j’essaie d’imaginer ce qui risque de m’arriver à l’avenir. Mon partenaire sera aussi énorme ? Aussi fort ? Ressentirai-je ce que cette épouse a ressenti ? Mon partenaire souhaite qu’un deuxième homme participe à notre cérémonie d’accouplement ? Aurai-je aussi envie de lui ? Je suis passée de l’excitation à la confiance la plus totale. Un désir brut. Serai-je aussi heureuse qu’elle lorsqu’ils me posséderont ?
Je n’ai jamais imaginé recevoir de fessées auparavant. J’ai toujours envisagé ça comme une punition et je ne me suis jamais portée volontaire. Je dois également avouer que je n’ai pas du tout envie d’être accouplée à un partenaire extraterrestre. Et me voilà attachée à cette drôle de table au centre de recrutement, tout est ma faute. Je me suis portée volontaire au Programme des Epouses Interstellaires pour aider mon frère à se sortir du pétrin dans lequel il s’est fourré avec des mecs pas très recommandables. Il est marié et a trois enfants, s’il ne parvient pas à se procurer une grosse somme d’argent, ils finiront tous à la rue. Ou pire. Bien pire.
Mon boulot d’enseignante en maternelle me permet à peine de vivre. Je n’ai pas assez d’argent pour aider mon frère. Mais je peux faire ça.
Jusqu’à cet instant, je ne pensais vraiment pas que le processus d’accouplement serait une étape agréable. Je doute fort que le programme des épouses soit capable de me trouver un partenaire convenable. Vraiment ? Comment un stupide programme informatique peut être en mesure de savoir quel est l’homme qui me convient le mieux dans toute la galaxie ? Je n’ai jamais trouvé le mec idéal sur Terre, comment vont-ils bien pouvoir me trouver un partenaire extraterrestre sur une planète reculée ? Le plaisir intense que j’ai ressenti me redonne espoir. Beaucoup d’espoir. C’est la première fois depuis des semaines que j’ai l’impression que les choses vont s’arranger. Se porter volontaire au Programme des Epouses Interstellaires n’est finalement peut-être pas la plus grosse erreur de toute ma vie.
Erreur ou pas, la famille c’est la famille. C’est le seul moyen d’aider mon frère. Mon corps et ma vie sont tout ce que je possède qui aient de la valeur. Je ne suis pas riche mais je suis jeune, féconde et célibataire. Et plutôt en manque d’inspiration. J’ai eu trois amants en cinq ans et aucun d’eux ne m’a fait jouir aussi intensément … à partir d’une simple simulation nerveuse. Grâce à la mémoire d’une autre femme.
Oh, mon Dieu. J’ai envie d’entendre ces voix graves derrière moi. J’ai envie de sentir cette main épaisse sur ma gorge, cette langue torride qui lèche mon c******s. J’ai envie d’être clouée sur place et qu’on me saute par derrière. J’ai envie …
L’écran bipe et je rougis, je sais qu’il est en train de décrypter mon rythme cardiaque alors que je me remémore ce qui vient de m’arriver. Non, ce n’est pas à moi que c’est arrivé, mais à elle. L’autre femme. Celle que la gardienne Egara a envoyé sur Prillon. Celle qui a été pénétrée par un guerrier. Un guerrier grand et fort avec un énorme sexe. Son premier partenaire. Peu importe sa signification.
« J’ai été accouplée là-bas ? Sur la planète de cette femme ? »
La gardienne Egara hoche sèchement la tête. « Oui. A un guerrier de Prillon Prime. »
Prillon Prime ? J’ai été envoyée sur Prillon Prime ? La planète habitée par cette race d’immenses guerriers ? Il est dit dans les brochures du programme que les guerriers Prillon recherchent effectivement des épouses pendant qu’ils effectuent leur service militaire. C’est l’une des trois races qui garde ses épouses avec eux sur leurs vaisseaux spatiaux. Dans l’espace. Sur le front, la guerre fait rage entre les races biologiques et la Ruche, les formes de vie artificielles et les races de cyborgs qui essaient de s’emparer de l’univers. Cette guerre a fini par arriver sur Terre et la coalition a accepté de prendre la Terre sous sa protection, à une seule condition.
Des épouses. Mille par an. La plupart des épouses en provenance de Terre sortent de prison. Les hommes politiques sur Terre ne sont pas contre sacrifier des criminelles pour atteindre le quota d’épouses extraterrestres, et me voilà en tant que volontaire, j’espère ne pas avoir fait la plus grosse erreur de toute ma vie.
Je me rappelle avoir lu que les hommes Prillon ont une confiance aveugle dans les aptitudes de leurs guerriers à prendre soin de leurs partenaires. Où qu’ils soient. Les guerriers Prillon ne manquent jamais aucun combat et sont les plus redoutés de la Coalition Interstellaire. Ils combattent sur la ligne de front et sont chargés de toute la flotte interstellaire.
Putain. Je ne vais pas sur une planète ! Je vais vivre sur un vaisseau spatial au milieu de nulle part pendant qu’ils combattent d’autres vaisseaux spatiaux ? Ou des cyborgs. Ou je sais pas quoi d’autre ! L’écran indique que mon rythme cardiaque s’accélère à nouveau mais pas d’excitation cette fois-ci. De panique.
Je secoue la tête. Une fois, deux fois. « Non. Il doit y avoir une erreur.
– Il n’y pas d’erreur, elle me réprimande. Votre accouplement est compatible à quatre-vingt-dix-neuf pour cent.
– Mais… » Je voulais aller sur Forsia ou sur les planètes jumelles Ania et Axion, ils vivent dans des villes opulentes qui regorgent de restaurants, de fêtes. Je ne veux pas aller sur un vaisseau de guerre dans l’espace.
« Du calme. » Elle emploie un ton tranchant, elle crache les mots tel un chat agacé. « C’est trop tard, l’accouplement est validé. Vous avez signé. Conformément à votre demande, votre famille a été rétribuée. A moins que vous ne souhaitiez retourner les fonds, vous devez remplir les obligations légales inhérentes au programme. Vous avez choisi le protocole d’accouplement. Vous devez en supporter les conséquences. »
La gardienne Egara devait être plutôt jolie lorsqu’elle avait vingt ans, dommage qu’elle soit si bourrue. Je comprends. La femme à la réception m’a dit qu’ils avaient peu de volontaires. La majeure partie des femmes que la gardienne Egara recrute sont des criminelles qui n’ont pas d’autre choix que d’adhérer au Programme des Epouses Interstellaires ou supporter une vie en prison.
« Humm. Je crois que votre emportement va figurer dans votre fichier d’épouse. Votre nouveau partenaire doit être informé de votre impertinence. »
J’écarquille les yeux et reste bouche bée.
« Une minute ! Je n’ai jamais donné mon accord pour ça. » Impatiente, je tire d’un coup sec sur les patchs autocollants reliés à mes tempes et fais la grimace lorsqu’ils s’accrochent à mes longs cheveux noirs. Je les tends à l’assistant qui termine de les démêler et quitte la pièce. La gardienne Egara a dû réaliser que j’allais lui carrer sa tablette dans le cul, elle avance la main dans un geste d’apaisement.
« C’est entendu, Mademoiselle Johnson. Je retire cette information de votre profil. » Elle tapote à nouveau sur l’écran et fronce les sourcils. Ses longs cheveux sont relevés en un chignon apprêté et son visage concentré la rend encore plus sévère. « Vous voulez bien m’indiquer votre nom pour le dossier. »
Je prends une profonde inspiration. « Hannah Johnson.
– Mademoiselle Johnson, êtes-vous ou avez-vous déjà été mariée ?
– Non.
– Avez-vous des enfants ?
– Non. » J’écarquille les yeux. Ils m’ont déjà posé ces questions. J’ai signé leur paperasse de merde en triple exemplaire, je suis sûre que c’est indiqué sur sa tablette.
« Parfait. » Elle tapote plusieurs fois sur son écran sans me regarder. « Je suis dans l’obligation de vous informer, Mademoiselle Johnson, que vous avez trente jours pour accepter ou refuser le partenaire attribué selon les protocoles d’accouplement. » Elle relève la tête et m’adresse un large sourire. « Vu le score, ça me paraît toutefois très improbable. »
Je ne fais pas confiance au logiciel utilisé pour accoupler les épouses à leurs partenaires, ça me rassure de savoir que la décision finale m’appartient.
« Ok.
– Il n’y aura aucun retour sur Terre possible, peu importe votre choix. Si votre nouveau partenaire ne vous convient pas, vous pourrez demander un nouveau partenaire principal à l’issue des trente jours… toujours sur Prillon Prime. Le processus peut se poursuivre jusqu’à ce que vous trouviez le partenaire idéal.
– Gardienne, j’aimerais savoir … »
Elle soupire. « Vous avez déjà signé les documents, Mademoiselle Johnson, je dois vous rappeler que vous n’êtes plus désormais une citoyenne de la Terre mais l’épouse d’un guerrier de Prillon Prime, et, en tant que telle, sujette aux lois et règles de votre nouveau monde.
– Mais—
– Hannah, vous avez été accouplée à l’un des guerriers les plus féroces de cette planète. Vous devriez en être fière. Soyez digne de lui. » J’ignore si l’ordre de la gardienne Egara est là pour m’encourager ou pour m’effrayer mais je n’ai plus le temps d’y réfléchir. J’ignorais qu’elle connaissait les détails personnels concernant les hommes extraterrestres auxquels elle m’a accouplée. Apparemment, elle en sait plus que moi. Elle m’apprécie peut-être plus que je ne l’imagine. M’aurait-elle accouplée à un guerrier cruel si j’avais été une tueuse en série complètement tarée ? Est-ce qu’elle raconte des mensonges à toutes les femmes en leur disant ô combien leurs partenaires sont fantastiques pour les inciter à quitter la Terre ?
Elle avance et se glisse près de mon fauteuil d’examen. Le mur s’entrouvre légèrement, laissant apparaître une alcôve bleutée. Je suis toujours étroitement attachée et ne peux rien faire lorsqu’une longue aiguille paraît. L’aiguille est reliée à un long bras métallique qui sort du mur. J’essaie de reculer et elle hausse le ton pour que je puisse l’entendre, un étrange liquide bleu bouillonne sous moi.
« Ne vous débattez pas, Hannah. Cet appareil va simplement implanter vos neuro-processeurs de façon définitive. Vous n’avez rien à craindre. » Elle m’adresse un sourire forcé les lèvres pincées, elle essaie de me rassurer. J’ai comme l’impression qu’elle ne fait pas souvent preuve d’autant d’affection.
Je glisse dans la petite alcôve et sens la piqûre de l’aiguille dans ma tempe, puis dans l’autre. Je suis persuadée que cette étrange sensation et le bourdonnement qui suit vont me donner une migraine d’enfer. Résignée à subir les effets indésirables des neuro-processeurs, je plonge dans une sorte de bain chaud. Une lumière bleue m’environne.
« Lorsque vous vous réveillerez, Hannah Johnson, votre corps sera prêt pour les protocoles d’accouplement en vigueur sur Prillon Prime et les besoins de votre partenaire. Il vous attendra. »
Putain de merde. « Là maintenant ? Tout de suite ? » Je tire sur les sangles qui retiennent mes poignets à la table. « Je n’ai pas dit au revoir à mon frère ! Attendez ! »
Pour une raison qui me dépasse, ma colère et ma frustration disparaissent, comme lavées par ce bain chaud. Qu’est-ce qu’ils mettent dans leur eau ? Je suis détendue, heureuse.
Complètement engourdie.
J’entends la voix sèche de la gardienne Egara, le ronronnement paisible des équipements électriques et de l’éclairage. « Le processus débutera dans trois… deux… un… »
Et c’est le noir complet.