I - Aux enfants de nos écoles

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I Aux enfants de nos écoles À l’occasion de leurs distributions de prix On a bien voulu me demander de parler ici aux petits enfants de France, et de leur parler de notre patrie. Or, voici que soudain je me sens effrayé devant une si belle mission : en effet, jadis n’ai-je pas été plutôt un errant qui a trop éperdument vibré partout, sous le charme de tous les pays de la terre… Il est vrai, au soir de ma vie, je viens de connaître que rien n’est adorable comme notre patrie française et qu’il faut tout sacrifier sans mesure, nos biens, nos existences, celles de nos frères et celles de nos fils, pour la défendre ; non seulement à cause de nous-mêmes, qui ne pourrions que mourir de sa mort, mais aussi parce qu’elle est une lumière qui ne saurait s’éteindre sans obscurcir un peu le monde. Laissez-moi en commençant relever une triste phrase, qui peut-être a déjà été prononcée devant vous, chers petits enfants de France, car il semble qu’elle ait une tendance à se propager dans certains milieux. « Nous faisons la guerre pour les riches », ai-je entendu dire, hélas ! de différents côtés, par de pauvres aveuglés, non pas, Dieu merci, dans les tranchées, mais à l’arrière, où des énergumènes sinistres ont eu le loisir de travailler les esprits. D’où peut bien sortir cette petite formule reptilienne, qui est l’absurdité même et qui sent le Boche ? Oh! quel blasphème éhonté ! N’est-il donc plus de toute évidence que nous faisons la guerre pour nous défendre, les uns aussi bien que les autres, contre la plus abominable agression qu’aient connue les temps modernes et qui dépasse en horreur ce qu’avaient osé jadis les tyrans Barbares. Les « riches », comme on les appelle souvent sans bienveillance dans les classes plus humbles, les « riches », mais ce sont précisément ceux-là au contraire qui auraient eu le moins à souffrir des tyrannies et rapacités du Monstre de Berlin, les travailleurs pauvres se seraient affaissés plus vite encore sous les terribles saignées allemandes. Chers petits enfants de France, prenez le temps de la lire, cette brochure, bien qu’elle soit infiniment moins attrayante que les jolis livres qui vous seront donnés en même temps le jour de vos distributions de prix. Lisez-la, car elle n’est pas une œuvre de haine, mais de vérité et de justice. Que ceux d’entre vous qui ont eu le bonheur de ne pas naître dans nos provinces envahies, que ceux qui ont même été préservés de voir nos effroyables dévastations, en trouvent ici le compte rendu, que je viens d’écrire d’après nature, aux Armées, avec un grand effort d’exactitude. Chers petits enfants de France, je ne vous demande pas, quand le sort des armes aura tout à fait tourné, d’aller vous venger, de l’autre côté du Rhin, et de faire là-bas ce que je vous raconte qu’ils ont fait chez nous. Non, laissez cela aux officiers et aux soldats d’un kaiser, – et du reste, n’est-ce pas, vous n’en seriez heureusement point capables. Mais cependant n’oubliez jamais. Ces gens d’Allemagne, je vous assure, ne sont pas des hommes dignes de fraterniser avec vous. Plus tard, quand ils tenteront de revenir encore s’insinuer cauteleusement à notre foyer, fermez-leur bien vos portes. Gardez-vous d’eux toujours, comme des loups et des vampires. Et tâchez que désormais notre bien-aimée patrie, instruite enfin par l’excès de ses malheurs, reste uniquement et plus que jamais française. Juillet 1917.
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