Lettre XVIIIFontainebleau, 17 août, II. Même ici, je n’aime que le soir. L’aurore me plaît un moment : je crois que je sentirais sa beauté, mais le jour qui va la suivre doit être si long ! J’ai bien une terre libre à parcourir ; mais elle n’est pas assez sauvage, assez imposante. Les formes en sont basses ; les roches petites et monotones ; la végétation n’y a pas en général cette force, cette profusion qui m’est nécessaire ; on n’y entend bruire aucun torrent dans des profondeurs inaccessibles : c’est une terre des plaines. Rien ne m’opprime ici, rien ne me satisfait. Je crois même que l’ennui augmente : c’est que je ne souffre pas assez. Je suis donc plus heureux ? Point du tout : souffrir ou être malheureux, ce n’est pas la même chose ; jouir ou être heureux, ce n’est pas non plus une