L’ours, ou lettre écrite de la montagneFelix qui potuit rerum cognoscere causas J’apportai, en venant au monde, un goût très vif pour la solitude. Sans doute ce goût m’avait été donné pour une fin utile ; mais au lieu de diriger l’emploi de mes facultés vers un but qui répondit à ma vocation dans l’harmonie des êtres, je travaillai longtemps à corrompre en moi l’ouvrage de la nature. Peu de temps après ma naissance, une chute que je lis en voulant monter pour la première fois au faite d’un arbre, me rendit boiteux pour le reste de mes jours. Cet accident influa singulièrement sur mon caractère et contribua beaucoup à développer le germe de ma mélancolie. La caverne de mon père était très fréquentée par les Ours du voisinage. C’était un fort chasseur, qui traitait splendidement ses convive