LETTRE LVIII LE VICOMTE DE VALMONT À LA PRÉSIDENTE DE TOURVELPar où ai-je donc mérité, Madame, et les reproches que vous me faites, et la colère que vous me témoignez ? L'attachement le plus vif et pourtant le plus respectueux, la soumission la plus entière à vos moindres volontés ; voilà en deux mots l'histoire de mes sentiments et de ma conduite. Accablé par les peines d'un amour malheureux, je n'avais d'autre consolation que celle de vous voir : vous m'avez ordonné de m'en priver ; j'ai obéi sans me permettre un murmure. Pour prix de ce sacrifice, vous m'avez permis de vous écrire, et aujourd'hui vous voulez m'ôter cet unique plaisir. Me le laisserai-je ravir, sans essayer de le défendre ? Non, sans doute : eh ! comment ne serait-il pas cher à mon cœur ? c'est le seul qui me reste, et