Le soleil filtrait à travers les rideaux de la chambre, projetant des éclats dorés sur le mur. Clara ouvrit doucement les yeux et s’étira, profitant de cette lumière apaisante. À ses côtés, Petter semblait encore plongé dans un sommeil agité. Elle l’observa quelques instants, cherchant à retrouver l’homme insouciant qu’il avait été. Les derniers jours avaient été marqués par un étrange changement en lui, quelque chose qu’elle n’arrivait pas à définir. Et bien qu’elle s’efforce de ne pas insister, son instinct lui soufflait qu’il lui cachait quelque chose.
Elle se leva doucement, décidant de lui préparer le petit-déjeuner. Ce matin, elle espérait que cette attention pourrait l’apaiser. Quelques minutes plus tard, elle revenait avec un plateau, et l’odeur de café frais réveilla Petter. Il ouvrit les yeux, et un sourire de gratitude se dessina sur ses lèvres.
— Bon matin, murmura-t-elle en lui tendant une tasse. J’ai pensé que ça te ferait plaisir.
Petter hocha la tête, visiblement touché. Il prit la tasse et lui adressa un sourire.
— Merci, Clara, c’est adorable, répondit-il, essayant de dissimuler la fatigue qui marquait ses traits.
Ils savourèrent leur café en silence, mais Clara ne put s’empêcher de tenter de briser la distance qui semblait les séparer.
— Tu sais, on pourrait peut-être organiser un week-end, juste toi et moi. Prendre un peu de distance, se retrouver, suggéra-t-elle doucement.
Petter posa sa tasse, hésitant un instant avant de répondre.
— Oui, ce serait bien, admit-il, bien qu’il sente que l’idée de s’échapper avec elle accentuait paradoxalement ses tourments. Il redoutait que même un voyage ne parvienne pas à dissiper les pensées obsédantes qui occupaient son esprit.
Alors qu’ils finissaient leur petit-déjeuner, le téléphone de Clara sonna, l’arrachant momentanément de ses réflexions. Elle s’excusa et se leva pour répondre, tandis que Petter resta seul avec ses pensées. Le nom d’Émilie hantait encore son esprit, et il ressentait un tiraillement entre son amour pour Clara et ce besoin irrépressible de comprendre ce qui avait poussé Émilie à revenir dans sa vie.
Au retour de Clara, son visage était illuminé d’enthousiasme.
— C’était mon père. Il veut m’emmener visiter un de ses projets de développement durable en montagne, et il m’a invitée à l’accompagner pour deux jours, expliqua-t-elle, un sourire radieux aux lèvres.
Petter acquiesça, sentant un étrange soulagement à l’idée qu’elle s’absente pour un court moment. Cette opportunité lui offrirait une courte pause, un moment pour réorganiser ses pensées et réfléchir à la meilleure manière d’aborder ce dilemme.
— Tu devrais y aller, répondit-il en souriant. Ça te fera du bien de passer du temps avec lui, et puis, ça te permettra de découvrir ce nouveau projet.
Clara lui adressa un sourire reconnaissant, ravie qu’il la soutienne dans cette décision.
— C’est vrai, et ça me donnera l’occasion de voir le travail de l’entreprise sur le terrain. Merci de comprendre, Petter.
Après le départ de Clara, l’appartement sembla se vider de sa chaleur et de sa légèreté habituelles. Petter restait assis, pensif, cherchant un moyen d’oublier la confrontation de la veille avec Émilie et les questions qui tournaient dans son esprit depuis son retour. Il se leva finalement, décidé à sortir pour se changer les idées.
Les rues de la ville, baignées par la lumière douce du matin, l’entouraient d’une atmosphère familière. Il marcha sans but précis, mais ses pas le guidèrent inconsciemment vers le quartier où il avait vécu avec ses parents durant son adolescence. Les souvenirs d’Émilie le suivirent, et il se retrouva, comme malgré lui, face au parc où ils s’étaient souvent retrouvés après les cours, partageant des moments de complicité et de rires.
Il s’assit sur un banc, la nostalgie lui nouant la gorge. Il se remémora les instants passés ensemble, ce sentiment d’insouciance et de promesse d’éternité qu’ils avaient partagé. Il repensait à la façon dont elle le regardait, à leurs rires, aux promesses échangées dans ce parc. C’était là qu’ils avaient parlé de leurs rêves, des voyages qu’ils voulaient entreprendre ensemble, et des projets qu’ils avaient pour leur avenir.
Mais ce rêve s’était brisé le jour où elle avait disparu sans un mot, le laissant seul avec ses questions et son incompréhension. Et aujourd’hui, même si Clara occupait une place essentielle dans sa vie, le retour d’Émilie avait réveillé une part de lui qu’il croyait perdue.
Il ferma les yeux, se demandant pourquoi ce passé le hantait autant. Était-ce un simple regret ou y avait-il encore, enfoui au fond de lui, une émotion qu’il n’avait jamais pu effacer ?
Deux jours plus tard, Clara rentra de son excursion en montagne, rayonnante et pleine d’énergie. La découverte des projets écologiques de son père lui avait insufflé un nouveau souffle, et elle était impatiente de le partager avec Petter. Elle entra dans l’appartement et le trouva assis dans le salon, lisant distraitement un livre.
— Petter ! s’exclama-t-elle en s’approchant pour l’embrasser.
Il la prit dans ses bras, tentant de masquer la distance intérieure qui continuait de le ronger.
— Tu m’as manqué, dit-il doucement.
Clara sourit, touchée par cette attention. Elle se lança immédiatement dans le récit de son voyage, décrivant chaque détail, chaque instant passé avec son père. Petter écoutait attentivement, admirant la passion qui brillait dans ses yeux, mais une part de lui restait déconnectée, toujours hantée par la silhouette d’Émilie.
Après avoir fini de lui raconter son séjour, Clara proposa de préparer un dîner pour célébrer leur retrouvaille. Elle s’affaira dans la cuisine, heureuse de retrouver leur quotidien, mais quelque chose dans l’attitude de Petter continuait de la troubler.
Au milieu du repas, Clara ne put s’empêcher de rompre le silence, cherchant des réponses à ce qui la troublait.
— Petter, j’ai l’impression que quelque chose te préoccupe. Je sais que tu n’aimes pas en parler, mais tu n’as pas été le même ces derniers jours. Tu sais que je suis là pour toi, quoi qu’il arrive, murmura-t-elle avec douceur.
Petter posa sa fourchette, pris de court par la question de Clara. Il sentait la sincérité et l’amour dans sa voix, et une part de lui désirait ardemment tout lui dire. Mais il se souvint de la douleur qu’il avait ressentie à l’époque, et il craignait de la revivre en dévoilant cette vérité.
— Clara… il y a des choses dans mon passé dont je n’ai jamais vraiment parlé, admit-il d’une voix hésitante. Des souvenirs qui refont surface, mais qui n’ont rien à voir avec nous.
Elle le regarda avec bienveillance, reconnaissant qu’il lui offre enfin une part de sa vérité.
— Je comprends, Petter. On a tous un passé, et parfois, il refait surface de manière inattendue. Si un jour tu te sens prêt à en parler, je serai là pour écouter.
Ils échangèrent un sourire, mais Clara sentait que ce moment de sincérité ne dissipait qu’en surface le mystère qui entourait ses pensées.
Alors que la soirée touchait à sa fin, Petter sentit un poids s’alléger légèrement. Il savait qu’il ne pouvait pas partager entièrement ce qui le hantait, mais cette petite confession semblait avoir apaisé Clara, qui se contenta de cet instant de franchise.
En se couchant, Clara se dit que peut-être, avec le temps, Petter serait capable de surmonter ces ombres de son passé. Mais elle ignorait encore l’ampleur des sentiments qu’il contenait et des souvenirs qui pesaient sur lui. Les non-dits persistaient, installant entre eux un mur invisible, et Clara, malgré sa compréhension, sentait au fond d’elle que cette distance n’était pas près de disparaître.
Petter,
allongé à ses côtés, fixait le plafond, sa main cherchant celle de Clara comme pour s’ancrer dans le présent. Mais, même avec elle près de lui, il sentait que ses pensées s’éloignaient vers des souvenirs d’une autre époque, là où une autre histoire l’attendait, en silence.