Petter se tenait devant la porte de l’appartement d’Émilie, son esprit en ébullition. Les souvenirs de leur passé se mêlaient aux questions qui le hantaient depuis leur dernière rencontre. Quand la porte s’ouvrit, révélant Émilie, il fut frappé par son apparence : ses yeux légèrement gonflés, ses traits fatigués. Elle esquissa un sourire tremblant.
— Merci d’être venu, murmura-t-elle, s’écartant pour le laisser entrer.
Il entra, remarquant la simplicité de l’appartement. Il prit place sur le canapé, tandis qu’Émilie s’assit en face de lui, tenant une tasse entre ses mains comme si c’était la seule chose qui la maintenait calme.
Après un moment de silence, il se lança :
— Émilie… J’ai besoin de savoir. Pourquoi es-tu partie si brusquement, sans un mot, il y a toutes ces années ? Tu me dois au moins cette vérité.
Elle leva les yeux vers lui, et ses lèvres tremblèrent légèrement. Elle posa sa tasse sur la table, visiblement prête à dévoiler un poids qu’elle portait depuis trop longtemps.
— Petter… Ce n’est pas parce que je le voulais. Je t’aimais, plus que tout. Mais j’ai été forcée de partir, chuchota-t-elle, la voix emplie de douleur.
Il fronça les sourcils, son cœur battant plus vite.
— Forcée ? Par qui ? Pourquoi ? demanda-t-il, la gorge serrée.
Elle inspira profondément, cherchant ses mots.
— C’était à cause de… Kéllia, murmura-t-elle. Dès le début de notre relation, elle ne m’a pas laissée tranquille. Elle m’a menacée, elle m’a harcelée. Elle voulait que je te quitte, et elle était prête à tout pour obtenir ce qu’elle voulait.
Petter resta figé, abasourdi par cette révélation.
— Kéllia ? Ma meilleure amie ? Non… Elle… Elle ne m’a jamais rien dit, elle n’a jamais laissé entendre… Pourquoi aurait-elle fait ça ? bredouilla-t-il, tentant de comprendre.
Émilie hocha la tête, les larmes roulant sur ses joues.
— Parce qu’elle t’aimait, Petter. Elle était jalouse de ce qu’on avait. Elle m’a dit que tu lui appartenais, que je n’étais pas à ta hauteur. Au début, je pensais qu’elle bluffait, mais… les choses ont empiré. Elle a commencé à mettre ses menaces à exécution. Mes parents ont perdu leur emploi. J’ai été expulsée de mon école. Elle contrôlait tout, et elle s’assurait que je sache que c’était de sa faute. Elle voulait me détruire, et elle y est presque parvenue.
Petter sentit une vague de colère et de culpabilité monter en lui. Il se passa une main sur le visage, bouleversé.
— Émilie… Je ne savais rien de tout ça. À l’époque, Kéllia était mon amie la plus proche. Je n’aurais jamais imaginé qu’elle… qu’elle puisse faire ça, murmura-t-il, la voix tremblante.
Elle essuya ses larmes, reprenant avec difficulté.
— C’est pour ça que je suis partie. Mes parents et moi avons décidé de tout quitter pour recommencer ailleurs. Je n’avais pas le choix, Petter. Elle était devenue dangereuse.
Il hocha lentement la tête, les pièces du puzzle commençant à se mettre en place dans son esprit.
— J’ai découvert qui elle était vraiment… bien plus tard, dit-il d’une voix sombre. Quand elle a essayé de faire la même chose avec Clara. Mais cette fois, elle n’a pas réussi. Clara avait le soutien de M. Solaris, et Kéllia a fini par tout perdre. Elle a été obligée de quitter le pays, et cette fois, pour toujours.
Émilie leva les yeux vers lui, visiblement surprise.
— C’est vrai ? Elle est vraiment partie ? demanda-t-elle, sa voix mêlant soulagement et incrédulité.
Il acquiesça.
— Oui. Elle n’est plus une menace pour personne. Mais pourquoi reviens-tu maintenant, Émilie ? Qu’est-ce qui t’a poussée à revenir après tout ce temps ? demanda-t-il, son ton se durcissant légèrement.
Émilie hésita un instant, évitant son regard.
— Un ami proche m’a contactée pour me dire que c’était enfin sûr, que Kéllia n’était plus là. Mais ce n’est pas la seule raison, Petter, avoua-t-elle, sa voix brisée. Je suis revenue… pour toi.
Ses mots frappèrent Petter comme une gifle. Il se recula légèrement, pris de court.
— Pour moi ? Mais pourquoi ? Tu savais que… que j’avais refait ma vie, Émilie. Je suis avec Clara maintenant, répondit-il, sa voix plus ferme qu’il ne l’aurait voulu.
Elle baissa la tête, les larmes revenant.
— Je le sais. Mais… je ne pouvais pas m’en empêcher. Petter, tu as toujours été là, dans un coin de mon esprit, de mon cœur. Je voulais te revoir, au moins une fois, même si je savais que c’était égoïste, murmura-t-elle.
Un silence tendu s’installa. Petter sentit son cœur se serrer, partagé entre les souvenirs d’un amour passé et sa loyauté envers Clara.
— Émilie… J’ai pensé à toi aussi, avoua-t-il à voix basse. Pendant des années, je me suis demandé pourquoi tu étais partie, pourquoi tu m’avais abandonné. Mais aujourd’hui… Clara est ma vie. Elle m’a sauvé d’un gouffre que je n’avais même pas vu venir, ajouta-t-il, son regard se perdant dans le vide.
Émilie hocha doucement la tête, un sourire triste sur les lèvres.
— Je comprends, Petter. Je ne veux pas détruire ce que vous avez. Mais je devais te dire la vérité, te montrer que… que je ne t’ai jamais abandonné volontairement, dit-elle, la voix tremblante.
Ils se regardèrent un instant, leurs émotions à fleur de peau. Sans réfléchir, Petter s’approcha et la prit dans ses bras. Ce n’était pas un geste romantique, mais un besoin mutuel de réconfort et de pardon. Émilie éclata en sanglots contre lui, libérant des années de douleur refoulée.
— Je suis désolé, Émilie. Je suis désolé pour tout ce que tu as enduré. Si j’avais su… je t’aurais aidée, murmura-t-il, la voix empreinte de regrets.
Après un long moment, ils se séparèrent, leurs regards marqués par une intensité qu’ils ne pouvaient expliquer.
— Merci, Petter, pour m’avoir écoutée. Et pour m’avoir pardonnée, dit-elle doucement.
— Prends soin de toi, Émilie, répondit-il, avant de se lever et de quitter l’appartement.
De retour chez lui, Petter se sentit déchiré. Il avait enfin des réponses, mais elles ne faisaient qu’ajouter à la complexité de ses émotions. Clara occupait son présent et son futur, mais Émilie avait marqué son passé d’une manière indélébile. Tandis qu’il entrait dans leur appartement, il se demanda s’il pourrait vraiment tourner la page et laisser tout cela derrière lui.