Chapitre 1
Christine et moi, regagnâmes notre bibliothèque, elle très attristée, moi de plus en plus agité… « Que vous semble de tout ceci ? » me demanda-t-elle. Je lui dis : « Christine, quand nous sommes entrés dans la chambre, avez-vous remarqué la figure du marquis ? – Non ! je ne regardais que la marquise !… – Eh bien, moi, j’ai regardé le marquis… Il n’était pas beau à voir, vous savez !… Ses yeux sanguinolents paraissaient prêts à jaillir de ses orbites comme deux billes de rubis, sa bouche s’ouvrait sur une denture ardente, féroce et toute sa figure ressemblait à un de ces masques japonais fabriqués pour terrifier l’ennemi ! Je n’ai jamais rien vu de comparable à cette vision si ce n’est l’air férocement joyeux du buste du marquis de Gonzague que l’on cache soigneusement à Mantoue, au rez-de-chaussée du Museo Patrio, dans une petite salle de débarras, recevant le jour par la place Dante… Ce marquis-là avait cet air, paraît-il, la veille de Fornoue, le jour où il paya dix ducats la première tête française coupée par ses stradiots, et il baisa sur la bouche l’homme qui la lui apportait… Ce n’était pas un vampire, mais c’était tout de même un buveur de sang à sa manière !… – Précisez votre pensée… me fit Christine d’une voix sourde, croyez-vous que nous ayons réellement surpris « notre marquis à nous » la veille de Fornoue ? – Ce serait tellement formidable, que, justement, je n’ose préciser ma pensée… « Il n’y avait peut-être là qu’une apparence, m’empressai-je d’ajouter. – En tout cas, murmura-t-elle, si la veille de Fornoue, Gonzague croyait se repaître de notre sang, son attente a été bien déçue le lendemain… – Oui ! quelqu’un est venu qui a troublé la fête… – Mon impression également, acquiesça-t-elle, est que nous avons dérangé tous ces gens-là !… Mais en supposant les choses au naturel, il ne faut pas nous étonner que le marquis ait été désagréablement surpris par notre arrivée… – Et si c’était vrai ?…fis-je. – Quoi ? si c’était vrai ?… quoi, si c’était vrai ? répéta-t-elle. – Oui ! laissons toutes les autres histoires de côté ! Il n’est pas besoin d’avoir vécu deux cents ans pour avoir des instincts de bête fauve… – Alors vous croyez ?… vous pouvez croire ?… – Écoutez, Christine, vous rappelez-vous que Sangor, lorsqu’il est arrivé la première fois dans la chambre, apportait un flacon ? – Oui, un flacon contenant du citrate de soude, il me semble ? – C’est bien cela ! – Et le marquis lui a dit de le reporter et de revenir avec du chlorure de calcium ? – Parfait ! Et qu’est-ce qu’il a fait avec le chlorure de calcium, Christine, pouvez-vous me le dire ? – Eh bien, il a arrêté le sang !… – C’est cela même… mais savez-vous, Christine, ce que l’on fait avec le citrate de soude ? – Non !… – Eh bien, avec le citrate de soude, on le fait couler ! » Elle me regarda comme si je devenais fou, à mon tour. « On le fait couler ? répéta-t-elle. – Oui, en ce sens qu’on le laisse couler, en empêchant de se former le caillot de sang qui fermerait la blessure… Frottez la blessure, ou la piqûre, avec du citrate de soude et la veine continuera à se vider de son sang comme l’eau coule d’un robinet… Enfin, ce n’est pas tout !… Une bouche qui aspirerait ce sang et qui serait frottée de citrate de soude n’aurait pas à redouter la coagulation avec laquelle il faut toujours compter… – Mais c’est effrayant, ce que vous me dites là ! Où avez-vous appris tout cela ? – Mais dans les livres de la médecine la plus sommaire… vous n’avez donc pas chez vous le Labosse illustré ?… Quand on est relieur, Christine, et qu’on ne s’intéresse pas seulement à la reliure… on finit par apprendre bien des petites choses. » Elle me regardait toujours et je vis bien que maintenant elle était au moins aussi agitée que moi… Elle me répéta encore : « Mais c’est effrayant ! La science à l’usage du vampirisme !… – De nos jours, fis-je en manière de conclusion, le vampirisme – si vampirisme il y a – ne peut être que scientifique. » Nous nous surprîmes à regarder les quatre portraits des quatre Coulteray qui, là-haut, sur le mur, nous souriaient d’une façon si énigmatique et si troublante – très troublante – dans le jour qui tombait, ne laissant au contour des choses qu’une ligne indécise, une sorte d’effacement de pastel. « C’est vrai qu’ils se ressemblent tout à fait étrangement, très étrangement, dit-elle. – Eh ! si c’est le même ! repris-je en essayant de mettre dans le ton dont je disais cela un peu d’ironie et de désinvolture… il a eu le temps de perfectionner sa méthode. » Mais nous cessâmes bientôt de plaisanter… car il y avait encore des gémissements là-haut !… Et comme ces gémissements se prolongeaient, nous ne pûmes nous empêcher de frissonner. « Tout de même, fis-je, il serait bon de savoir comment cette blessure est arrivée… Après tout, le marquis peut nous raconter ce qu’il veut !… »
Il était tard maintenant, l’heure du dîner était passée depuis longtemps… nous ne nous décidions point à quitter ces lieux habités par une si mystérieuse douleur… On devait nous croire partis… Notre dessein n’était point de nous dissimuler : cela eût été indigne de nous, mais en de telles circonstances on pouvait peut-être avoir besoin de notre secours ; en tout cas, c’est ce que nous pouvions répondre à qui s’étonnerait de nous trouver encore là… Dans notre cabinet de travail, nous avions allumé la petite lampe électrique portative dont la lueur dessinait un carré clair dans la nuit du jardin. Un grand silence s’était fait soudain dans l’hôtel, silence qui nous pesait peut-être encore plus que le gémissement lugubre et monotone qui nous tenait dans une angoisse si aiguë tout à l’heure… Une demi-heure se passa ainsi ; nous travaillions vaguement à je ne sais quoi, livrés, Christine et moi, à des pensées que nous n’osions sans doute pas nous communiquer… Enfin je lui demandai : « Et vous, Christine, le marquis vous laisse-t-il tranquille maintenant ? » Elle fut surprise par ce « et vous ? ». « Comment, et moi ? Pourquoi et moi ? fit-elle, assez émue… Croyez-vous qu’il y ait un rapprochement quelconque à faire entre… entre les imaginations de là-haut… et ce qui s’est passé ici ? – Enfin il n’a pas renouvelé sa tentative ? » Elle sembla hésiter une seconde et puis : « Non… je me suis arrangée pour cela !… – Au fait, je dois constater que le marquis s’est toujours montré devant moi d’une correction parfaite à votre égard !… On dirait qu’il n’ose pas vous regarder, même quand il vous parle. – Sans doute est-il un peu honteux, expliqua-t-elle avec simplicité, de s’être laissé aller à… à ce que nous pouvons appeler la violence de son tempérament… C’est vrai que, dans ces moments-là, il n’était pas beau à voir… On n’aurait su dire s’il voulait m’embrasser ou me mordre !… – Ou vous mordre ! répétai-je en la regardant… – Oh ! mais attention ! fit-elle en me souriant… c’est une façon de parler… je ne crois pas aux vampires, moi !… mais tout de même, il m’a fait peur !… – C’est extraordinaire que vous soyez restée ici, Christine ! – Je vous ai déjà expliqué pourquoi, monsieur Bénédict Masson !… » Elle me jeta cette réplique comme si je l’avais outragée… Ce fut elle qui rompit le silence pénible, qui avait suivi… « Dites-moi, mon ami, c’est vrai que vous avez une charmante maison de campagne ? » Je m’attendais si peu à cette question que j’en fus bouleversé. « Pourquoi, pourquoi me demandez-vous cela ? » Elle me considéra avec un étonnement profond : « Mais… qu’est-ce qui vous trouble ainsi ?… Ma question n’a rien que de très naturel… – Pourquoi me parlez-vous de ma maison de campagne ?… – Mon Dieu, si j’avais su… vous voilà tout pâle !… C’est le marquis qui m’a dit : « M. Bénédict Masson a une charmante maison de campagne… je m’étonne qu’il ne vous y ait pas encore invitée !… » – Comment sait-il que j’ai une « charmante » maison de campagne ? Christine ! Christine !… ma maison de campagne n’est pas charmante, c’est la plus triste, la plus mélancolique demeure que l’on puisse rencontrer entre la lisière d’un bois et un étang noir, limoneux, aux eaux de plomb !… Christine, je ne vous y inviterai jamais !… et n’y venez jamais !… » Elle était de plus en plus stupéfaite : « Quel drôle de garçon vous faites ! finit-elle par dire… Si je m’attendais à cette… véhémence !… bien, bien, mon ami, je n’insiste pas… – Le marquis ne vous a pas dit comment il savait ? – Mais si… il a eu, un moment, l’intention d’acheter d’immenses terrains du côté de Corbillères-les-Eaux… C’est bien par là, n’est-ce pas ? – Oui… moi, je suis sur l’étang… tout au bord de l’étang… de l’étang noir !… – Eh bien, le marquis, qui a visité le pays et qui a dû se renseigner sur les propriétaires des terrains qu’il voulait acheter pour les réunir en une seule propriété… le marquis trouva votre villa charmante, voilà tout. » J’étais tellement agité que j’allai à la fenêtre que j’ouvris… j’avais besoin de respirer… j’essayai de reprendre mon calme… Je m’en voulais mortellement de n’avoir pas su me contenir… À ce moment, dans le carré de lumière qui s’allongeait devant moi, sur la pelouse, une forme blanche glissa, légère et silencieuse comme un fantôme. Je n’eus que le temps de me précipiter à la porte qui était restée ouverte sur le jardin pour recevoir dans les bras cette pauvre chose agonisante, et qui déjà ne pesait pas plus qu’une ombre… Son souffle expirait sur ses lèvres exsangues ; l’ovale de son visage s’était allongé en une ligne plus idéale encore, la mort semblait déjà fixer cette fragile image pour l’éternité et la lueur qui errait au fond de ses orbites creuses comme deux abîmes n’appartenait plus aux feux de ce monde… C’est en regardant des choses que nous ne pouvions pas voir, nous autres qui n’étions point comme elle sur la frontière du néant, qu’elle nous dit à tous deux (car Christine, elle aussi, s’était précipitée) : « Eh bien, êtes-vous convaincus, cette fois. Ils ne m’ont laissé que l’âme !… » Nous la déposâmes dans un fauteuil avec d’infinies précautions ; sa tête renversée sur le dossier était belle comme un marbre sur une tombe, elle semblait considérer une dernière fois (et cette fois sans épouvante, car elle espérait lui échapper en franchissant les portes de la mort) le monstre en quatre images qui, du haut du mur, lui adressait sans se lasser son redoutable sourire : « Vous avez vu aujourd’hui, fit-elle avec effort, sa cinquième figure au moment où il va boire ma vie !… Dites-moi s’il ne vous a pas épouvantés !… Et maintenant il est parti !… il est parti avec tout mon sang… et je vais mourir, car je n’ai plus peur de la mort ! « Oui, je me suis entendue avec Sangor, qui fait tout ce que l’on veut, pourvu que ce ne soit pas défendu par sa religion… quand je serai morte, il viendra, dans ma tombe, me couper la tête, et ainsi, il n’y aura pas de danger que je revienne, comme le monstre, boire le sang des vivants… « Les vivants peuvent être tranquilles, bien tranquilles ! « C’est un fait !… C’est la seule manière qu’il a de me sauver de la vie et de la mort… « Oh ! je suis bien heureuse ! je suis sûre de Sangor ! il me coupera la tête comme c’est ordonné dans le livre contre la résurrection !… « Monsieur Bénédict Masson, vous avez lu mes livres !… Alors, vous savez bien qu’il faudra qu’on me coupe la tête !… « Je suis sûre de Sangor… je lui ai donné un collier de perles magnifique !… » Elle prononçait ces bouts de phrase comme si elle allait mourir après chaque mot… Et moi, j’aurais bien voulu lui poser une question pendant qu’il en était temps encore… Je profitai d’un moment où elle se tut, la tête renversée, les paupières lourdes, la gorge tendue comme si elle s’offrait déjà au couteau de Sangor… Je dis : « Le marquis nous a conté que vous preniez l’air à la fenêtre du boudoir et que vous veniez de vous piquer le bras aux épines du rosier qui monte contre le mur… et que c’est alors que vous avez poussé ce grand cri… » Les paupières se relevèrent pour laisser passer une petite flamme qui, presque aussitôt, s’éteignit entre les cils rapprochés. « Je ne me suis point piquée au rosier, on ne crie point à la mort quand on se pique à un rosier… j’ai crié quand il m’a mordue !… – Il était avec vous dans le boudoir ? – Mais non !… – Alors il était dans le jardin ? – Mais non !… je ne sais pas où il était !… – Comment ! il n’était pas avec vous et il vous a mordue ? – Certes !… Il mord comme il veut ! quand il veut ! C’est en vain que je m’entoure de fourrures ! – Mais enfin, il ne mord pas à distance ? – Si !… » Il n’y avait plus rien à dire… L’affaire était jugée… Nous étions là tous les trois, accablés sous des idées différentes, quand Sangor parut. Il emporta dans ses bras puissants la malheureuse dont la tête roula sur son épaule, sa tête que je voyais déjà détachée du tronc, dans un rêve d’horreur et de folie… Du reste, tout ne m’apparaît plus que sous ces affreuses couleurs… Et il n’est pas jusqu’au regard de Christine que je ne trouve un peu trouble, quand, restés seuls, je lui demande encore : « Eh bien… que dites-vous de tout cela ?… » Chose singulière, c’est la première fois que je ne lui entends pas dire en parlant de la marquise : « Elle est folle ! »
30 juin. – C’est fini ! tout est fini ! et c’est bien de ma faute ! Comme on dit dans les romans populaires : « J’en pleurerai longtemps des larmes de sang ! » J’ai perdu Christine et me voilà exilé à nouveau dans ma sinistre petite maison de campagne de Corbillères, auprès de l’étang aux eaux de plomb ! » « Corbillères, corbillard »… je passe mes journées à mener le deuil de mes dernières illusions et de mon fol amour… Cette dernière phrase insipide me soulève le cœur… Illusion ? fol amour ? Est-ce avec cette eau de rose que je vais pouvoir écrire ce qui est arrivé ?… J’étais devenu comme une bête ensorcelée autour de Christine. Il faut vous dire que, depuis huit jours, nous étions seuls dans l’hôtel. Le marquis avait emporté la marquise expirante à son vieux château de Coulteray, sans doute pour qu’elle fût plus près de son tombeau qui l’y attendait. Toute la domesticité avait suivi. Seul, avec Christine !… Et voici ce qui est arrivé. C’était un soir… après dîner… dans le jardin où nous revenions quelquefois, Christine et moi, sans nous être donné rendez-vous… Depuis les dernières scènes auxquelles nous avions assisté, quelque chose d’assez mystérieux semblait nous avoir rapprochés davantage, du moins je me l’imaginais, car jamais encore je n’avais vu Christine aussi confiante, ni aussi simple avec moi, ni aussi près de moi… C’était un soir d’une douceur ineffable après la grosse chaleur du jour… je n’avais jamais été aussi heureux ; nous étions assis l’un près de l’autre ; un même attendrissement – qui n’était peut-être, hélas ! que de l’apaisement chez Christine – nous tenait silencieux… Mes pensées tournaient à la romance… autour de nous les murailles grises se fondaient dans le repos ; un chêne solitaire vacillait d’ivresse en se penchant au-dessus de l’abîme obscur de nos cœurs… Ma main se posa sur sa main – geste inconscient s’il en fut jamais – et sa main tiède resta dans la mienne. Évidemment, évidemment, quand je pense encore à cette minute précieuse, c’est vers toi que je me retourne, nuit, ténèbre propice, voile sacré derrière lequel s’oublia ma laideur ! De ce que Christine n’avait pas retiré sa main, je concluais volontiers que mon contact ne lui déplaisait point – et cela pouvait déjà passer pour la plus grande victoire de ma vie – quand elle me demanda sur le ton de la plus sournoise confidence : « Est-elle vraiment folle ? – Qui donc ? interrogeai-je, assez dépité de constater que, dans le moment même, sa pensée était si loin de moi que je ne la rejoignais pas. – Mais… la marquise ? – Je vous avouerai, fis-je, avec un peu d’humeur, que je ne pensais plus à cette malheureuse… Pourquoi me demandez-vous cela ?… – Parce que… – Parce que… quoi ? N’étions-nous pas d’accord là-dessus ?… Pouvons-nous autre chose pour elle que la plaindre ? – Oui, oui !… la plaindre !… répéta-t-elle avec sa voix de rêve… Elle n’a pas su résister, elle !… résister à l’ambiance !… – Que voulez-vous dire ? Expliquez-vous, Christine ? – Mon cher Bénédict, si je vous dis cette chose à laquelle j’étais cependant résolue à n’attacher aucune importance, c’est à cause d’une certaine coïncidence dont je ne laisse pas d’être assez troublée, je l’avoue… – Vous m’intriguez, Christine… (Pendant ce temps sa main était toujours dans la mienne et cela m’inspirait des pensées telles que j’avais le plus grand mal à la suivre.) – Eh bien ! moi aussi, j’ai été piquée !… – Seigneur Dieu !… Expliquez-vous, Christine, expliquez-vous ! – Oui, j’ai été piquée par le rosier… Oh ! il y a quelque temps de cela !… Et au bras, comme elle, et au même endroit qu’elle !… Et avant elle !… » J’essayais de voir son visage, mais elle le tenait penché et détourné de moi… « En vérité ! en vérité !… voilà une bien grande aventure ! déclarai-je assez froidement… elle s’y est penchée elle-même et vous avez été piquée par le même rosier !… C’est là quelque chose de tout à fait extraordinaire !… – Non ! releva-t-elle doucement, toujours de sa lointaine voix, non… ce n’est pas tout à fait extraordinaire… mais figurez-vous qu’à la suite de cette piqûre, je me suis sentie comme engourdie, sinon empoisonnée, enfin dans un état de faiblesse cérébrale telle que, rentrée dans la bibliothèque, je me suis étendue sur le divan tout juste pour fermer les paupières et pour avoir le plus douloureux des rêves… – Quel rêve ? – J’ai vu le marquis, avec cette figure atroce que vous lui avez découverte l’autre soir quand vous avez pénétré chez la marquise après l’accident… Il s’est approché de moi… et malgré tous mes efforts pour l’éloigner, il s’est emparé de mon bras et, collant ses lèvres à ma blessure, il aspirait tout mon sang… toute ma vie !… – Vous avez eu vraiment ce rêve-là ?… – Vraiment !… – La marquise vous avait déjà raconté toutes ses histoires de broucolaque ?… – Oui !… – Et vous vous étiez endormie sur le divan, au-dessous des quatre portraits des quatre Coulteray ? – C’est cela même. – Alors concluez vous-même, Christine !… – J’ai conclu ! j’ai conclu !… Oh !… Oh !… j’ai conclu !… mais alors je n’avais pas vu la marquise piquée comme moi au bras, en se penchant à la même fenêtre, et je ne l’avais pas vue revenir comme un fantôme nous crier : « Eh bien, êtes-vous convaincus cette fois, ils ne m’ont laissé que l’âme !… »