XXV
Entre deux jeunes gens – presque deux enfants – la connaissance est bientôt faite. Pas n’est besoin de s’appesantir sur les détails de la première rencontre de ceux-ci. À partir de ce jour, Arthur ressentit pour la chasse une passion que sa mère n’essaya pas de combattre, car toute passion, dans la pensée de cette femme experte, était salutaire, si elle devait avoir pour effet de vous distraire de l’amour. Chaque jour donc, après déjeuner, Arthur se rendait à l’Île-Belle. Il causait poules et dindons – car il n’était pas s*t – avec la fermière ; il parlait fourrage et moisson avec le fermier. Ce qu’il disait à Flore, qui se trouvait toujours sur son chemin, nul n’a le droit de le demander, mais il est trop facile de le deviner. Il lui disait tout ce qui lui passait par l’esprit, hormis cette phrase, si simple à prononcer, et qui aurait été si bien en situation : « Je vous aime ! » Une telle phrase lui paraissait un monde à soulever. On est fort timide à seize ans, et la lecture de Jean-Jacques et de Bernardin de Saint-Pierre, tout en vous révélant certaines choses fort indiscrètes, ne me semble pas faite pour vous délier la langue.